A l’absence du Premier ministre en visite médicale à Londres, le Directeur de Cabinet a remis sa lettre de démission au PM faisant fonction José Makila qui ne l’a pas acceptée, cette matière n’entrant pas dans le régime d’intérim mais le vin était déjà tiré!
«Mon Directeur de cabinet a craqué!», a martelé le Premier ministre Bruno Tshibala, intervenant pour la première fois jeudi 8 mars, trois jours après les incidents de la Primature, qualifiant d’affabulations le nombre de 800 conseillers évoqués par son dircab, Michel Nsomue Nsomue, précisant que son cabinet compte quelques 300 membres dont environ 80 conseillers.
«Partout dans le monde, lorsqu’un grave manquement est commis, il altère les rapports et invite à prendre des décisions qui s’imposent», a déclaré Tshibala, officialisant depuis l’Europe le divorce d’avec son principal collaborateur.
A Kinshasa, jeudi 8 mars, après deux nuits passées au cachot des services de sécurité, en compagnie de ses trois compagnons d’infortune, Michel Nsomue Nsomue n’a pas eu d’autre choix que de rendre sa démission au Premier ministre faisant fonction José Makila Sumanda qui ne l’a pas acceptée, cette matière n’entrant pas dans le régime d’intérim alors que le vin était déjà tiré. Pendant 48 heures, le malin Dircab a tenté de se jouer des officiers de Police qui l’entendaient en proposant d’échanger cette démission contre sa libération et celle de sa fille.
Retourné au bureau mercredi 7 mars pour rédiger la fameuse lettre de démission, Michel Nsomue Nsomue a préféré accordé des interviews à certains médias pour démentir son arrestation, engageant une sorte de bras de fer. «Dans la nuit du 7 au 8 mars, on lui a fait comprendre que sa démission était avant tout dictée par les actes posés, contraires à l’honneur et à la dignité de ses fonctions, que sa démission n’excluait pas d’éventuelles poursuites judiciaires et qu’il n’avait pas le droit de réclamer une justice taillée sur mesure», a confié une source proche du dossier.
Qu’est-ce qu’il était beau ce temps où les hauts dignitaires de l’Etat prêtaient serment en prenant l’engagement de n’entreprendre aucun acte contraire à l’honneur et à la dignité de leurs fonctions! D’avoir donné volontairement aux confrères des chiffres -800 conseillers nommés à son insu- contredits par le Premier ministre, Nsomue Nsomue donne l’impression d’avoir volontairement levé l’option d’éclabousser la personne de Bruno Tshibala, de brouiller les pistes sur les présumés détournements des salaires des conseillers et chargés d’études et de foutre le bordel avant de s’en aller.
Le Dircab a cependant raté son coup de poker. Preuve qu’il s’est joué de ces médias et était déjà tombé en disgrâce, c’est le Dircaba Jean-Félix Kamanda qui a signé, le même jour, la décision de suspension définitive du conseiller technique Harmed Kili, gendre du Premier ministre, Candide Kiabu, assistante et fille du Directeur de cabinet, et de Mme Clémence Bilongo, chargée d’études proche du dircab, celle-là même qui avait filmé l’altercation.
Le Dircaba Jean-Félix Kamanda a également suspendu de leurs fonctions au sein de la Primature les policiers Junior Kayembe Tshikumba et Donat Mukango Pongo impliqués dans la bagarre, avant d’instituer, par une note circulaire, une commission d’enquête chargée «de faire la lumière sur les incidents inacceptables qui se sont produits dans les installations de la primature en date du 6 mars 2018». Le Premier ministre a certes joué la carte de l’apaisement et de la hauteur, la vague Nsomue est susceptible de faire tanguer le navire dont il est le capitaine.
Arrogance préjudiciable
Début mars, des bruits faisant état des détournements des salaires à la Primature circulent, tableaux chiffrés à l’appui. Le samedi 3 mars, Michel Nsomue Nsomue, directeur de cabinet et ancien membre de la Banque centrale du Congo -BCC-, tentant de répondre aux nombreuses accusations portées contre lui sur la toile, a publié un communiqué d’un feuillet pour mettre en garde quiconque chercherait à distiller des fausses informations. Imbu de lui-même il crache: «des ennemis de l’orthodoxie financière sévèrement instaurée dans la gestion du cabinet du Premier ministre, déçus dans leurs calculs égoïstes de s’enrichir sur le dos du trésor public, s’inventent des décaissements fictifs des fonds qu’ils imaginent avoir été effectués par la Banque centrale du Congo en faveur de la Primature». Et d’ajouter: «Non seulement ils publient dans les réseaux sociaux des tableaux insensés avec des montants qui ne reposent sur aucun document comptables concepts le, allant jusqu’à confondre financiers élémentaires».
Lundi le 5 mars, les membres du cabinet lésés réagissent en déballant Nsomue Nsomue dans une mise au point virulente. «Votre mise au point n’apporte aucune lumière sur la question principale, celle relative au non paiement des salaires des conseillers et chargés d’Etude. Le reste des chiffres ne nous intéresse pas. D’ailleurs, elle suscite plus d’interrogations voire des zones d’ombres», écrivent-ils.
Puis: «Vos collaborateurs nommés depuis 5 mois par Décret du Premier ministre comme vous, travaillant sans salaire et pourtant, pour mémoire, lors de votre propre nomination, ainsi que vos adjoints en mi-juin 2017, vous vous êtes convenablement payé dès le premier mois bien que presté en partie. Vous avez également payé vos propres enfants et ceux de vos adjoints qui n’étaient même pas encore nommés. Pourquoi ces deux poids, deux mesures?
Les indignés dénoncent également le discrédit que le Dircab apporte au Chef du gouvernement qui lui a totalement fait confiance. «Nous sommes des parents, nous avons des obligations à honorer, cependant avec des sommes modiques, suivant vos humeurs, allant de 150.000 à 450.000 Fc pour un chargé d’Etude ou 300.000 à 700.000 Fc pour les conseillers, comment honorer nos engagements?», se demandent-ils.
Et d’ajouter: «Au lieu d’afficher une arrogance parce que vous avez été capable d’acquérir des biens immobiliers en un temps record, il serait indiqué de vous humilier avant que la justice soit appelée à clarifier la source de vos présumées acquisitions, à hauteur de 1 million de dollars de deux appartements aux immeubles CTC pendant que de familles entières de vos collaborateurs souffrent pour nouer les deux bouts du mois».
Vraisemblablement, les auteurs de la mise au point étalent la mauvaise foi du directeur de cabinet qu’ils accusent publiquement de pratiquer la politique de «diviser pour bien régner». «Il est bien dommage de constater que vous appliquez une vieille recette de diviser pour mieux régner en soudoyant certains collègues, faibles d’esprit, avec des miettes, afin d’assurer votre protection. Le salaire est un droit, ce n’est pas une faveur quelconque que vous nous accorderiez. Voilà pourquoi nous avons décidé de porter devant la justice cette affaire honteuse pour que toute la lumière soit faite», réagissent-ils. Et de conclure: «Vos leçons sur les finances publiques devraient plutôt vous aider à savoir qu’on ne détourné jamais les salaires des collaborateurs car tôt ou tard, on les paie». Voilà qui clouait Michel Nsomue Nsomue au pilori.
AKM
Octave MUKENDI