Si négocier est un art, les Félix Tshisekedi, Christophe Lutundula, Olivier Kamitatu, Valentin Mubake, Martin Fayulu et autres Delly Sessanga doivent jauger leurs talents et réaliser qu’ils sont allés aux discussions du Centre Interdiocésain juste pour obtenir qu’une icône nationale de la trempe de Tshisekedi, en dépit de tout son poids historique et de la taille sociologique de l’UDPS, soit réduite à diriger une structure ou une Institution d’appui à la démocratie dont l’animateur a rang de ministre et est protocolairement moins qu’un Premier ministre, encore moins qu’un vice-Premier ministre, un poste que Vital Kamerhe a rejeté dans le gouvernement Badibanga…
Convoqués pour 4 jours, les travaux consacrés aux arrangements particuliers entre les parties signataires de l’Accord de la Saint-Sylvestre tirent en longueur. Samedi 21 janvier, la plénière supposée être la dernière a été renvoyée à dimanche 22 janvier, à la grande désolation de la médiation. «Malheureusement, la plénière est encore renvoyée à dimanche à 14 heures. Les parties prenantes discutent encore du Comité national de suivi de l’Accord du 31 décembre. Peut-être que la semaine prochaine, elles vont discuter du gouvernement. Nous observons. Nous attendons», a dit le secrétaire intérimaire de la CENCO, l’abbé Donatien Nshole, cité dimanche par le site «Actualite.cd», le jour où l’AR/Rassemblement Delly Sesanga Hipung a annoncé via son compte Twitter la signature des arrangements particuliers pour le 28 janvier prochain.
On a appris qu’en accord avec la CENCO, les parties ont pris l’engagement de notifier Tshisekedi jeudi prochain de leur décision inscrite dans le compromis de lui confier la direction du Comité national de suivi de l’Accord. On a également appris que les évêques ont accepté d’offrir des locaux devant servir provisoirement des bureaux au Comité national de suivi.
La veille, Lambert Mende, Emmanuel Shadari et d’autres délégués du groupe des signataires de l’Accord du 18 octobre ont fait le déplacement de l’hôtel Faden House de l’opposant Martin Fayulu. «Nous avons réglé la question liée à la gestion du Comité national de suivi de l’Accord, il reste maintenant celle qui concerne le gouvernement», a déclaré dimanche à la presse Martin Fayulu sans donner des précisions sur le statut de Tshisekedi, désigné d’office président du Comité national de suivi de l’Accord du 31 décembre, et les quotas à attribuer aux délégués issus d’autres composantes signataires de ce compromis politique.
La mise en œuvre de l’Accord de la CENCO est étroitement liée aux résultats de ces conciliabules. Et de l’avis de certains observateurs, ce compromis politique, qui pèche en se réduisant au partage des postes, risque de ne jamais être appliqué si les uns et les autres se sentent floués, à commencer par Joseph Kabila et Etienne Tshisekedi, les deux principaux protagonistes de cette affaire devenue passionnelle et compliquée.
Aussi considère-t-on qu’outre l’aspect lié à l’inclusivité, de leurs sorts respectifs dépend le succès de bons offices des évêques catholiques. C’est le moment indiqué, semble-t-il, de regarder qui a obtenu quoi entre Kabila et Tshisekedi.
Président autoproclamé puis moins qu’un ministre d’Etat!
Président de la République réélu à l’issue de la présidentielle du 28 novembre 2011, atteint par la limite des mandats après le 19 décembre 2016 mais maintenu en poste par l’arrêt de la Cour constitutionnelle et, par voie de conséquence, les Accords du 18 octobre et du 31 décembre 2016, Kabila est assuré de préserver son statut et ses prérogatives de Chef de l’Etat… jusqu’aux prochaines élections.
Une victoire supplémentaire au détriment de son rival, l’autre Président de la République, autoproclamé celui-là, Etienne Tshisekedi. Après 35 ans de lutte pour la démocratie, 6 ans après avoir prêté serment dans une pièce de sa résidence et attendu sans succès l’imperium, des mois après avoir réclamé un dialogue direct avec la Majorité présidentielle et ses alliés, l’opposant historique ne tire pas les mêmes bénéfices que Kabila. Loin s’en faut. Assuré certes de présider le Conseil national de suivi de l’Accord avec la garantie hypothétique d’avoir un droit de regard sur l’action de l’Exécutif, en attendant de savoir s’il échappera ou pas à une nomination via une ordonnance signée de la main de Kabila, Tshisekedi chute de son prestigieux fauteuil présidentiel à la présidence d’une structure honorifique avec rang de ministre, à l’instar de ses collègues présidents de trois Institutions d’appui à la démocratie existantes, notamment la Commission nationale électorale indépendante -CENI-, le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication -CSAC- et le Conseil national des droits de l’homme -CNDH. Tshisekedi tel un ministre de Joseph Kabila, Joseph-Désiré Mobutu et Laurent-Désiré Kabila qu’il a combattus doivent se retourner dans leurs tombes.
Si négocier est un art, les Félix Tshisekedi, Christophe Lutundula, Olivier Kamitatu, Valentin Mubake, Martin Fayulu et autres Delly Sesanga doivent se mettre à jauger leurs talents et réaliser qu’ils sont allés aux discussions du Centre Interdiocésain tout juste obtenir qu’une icône nationale de la trempe de Tshisekedi, en dépit de tout son poids historique et de la taille sociologique de l’UDPS, soit confinée au rôle d’un animateur d’une Institution d’appui à la démocratie et se contente d’être moins qu’un Premier ministre, encore moins qu’un vice-Premier ministre, un poste que Vital Kamerhe a rejeté dans le gouvernement Badibanga, préférant y placer son ami et ancien directeur de cabinet Pierre Kangudia.
Le sphinx s’est fait démonter comme jamais auparavant. Avec ce statut négocié, Tshisekedi est aujourd’hui l’égal du ministre des Relations avec le Parlement Justin Bitakwira ou de Kalenga Ilunga Oly, son ancien assistant promu ministre de la Santé. Il est moins que le ministre d’Etat Michel Bongongo, le lieutenant du speaker de Sénat Léon Kengo wa Dondo, permuté du Budget à la Fonction publique, ou son collègue de l’Emploi Matuku Memas, cadre du PALU de Gizenga Fundji, ancien directeur général adjoint de la Société congolaise des transports et ports -SCTP. Le gâchis prendrait davantage d’ampleur si, par népotisme, le lider maximo se résolvait à désigner son fils Félix comme candidat Premier ministre comme le suggèrent ses alliés du Rassemblement.
AKM
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