1.Contexte géographique: les 9 pays frontaliers de la RDC
La RDC a une superficie de 2.345.410 Km² et un périmètre de 10.730 Km, constitué des frontières avec ses 9 pays voisins. Il s’agit de:
au Sud:
– l’Angola …………………………….: 2.511 Km,
à l’Ouest:
– la République du Congo…….: 2.410 Km,
au Nord:
– la République centrafricaine….: 1.577 Km,
– le Soudan du Sud………………..: 628 Km,
S/Total: 2.205 Km
à l’Est:
– la Zambie…………………………..: 1.930 Km,
– la Tanzanie…………………………: 459 Km,
– le Burundi………………………….: 233 Km,
– le Rwanda………………………….: 217 Km,
– l’Ouganda………………………….: 765 Km,
S/Total: 3.604 Km
Total général du périmètre 10.730 Km.
2. Problématique.
Le Congo dit démocratique est un pays qui connait, depuis 1994, dans sa partie orientale, des problèmes sécuritaires, d’immigration clandestine, des pillages de ses ressources naturelles et d’occupation illégale de ses terres. Au Sud, avec l’Angola 2.511 Km, la RDC n’a pas de problème à sa frontière, ni à l’Ouest, avec son unique voisin, la République du Congo. Il en est de même au Nord, avec le Soudan du Sud et la République Centrafricaine, où en dehors du problème de Mbororo, la RDC n’a pas des problèmes particuliers.
A l’Est, la RDC a 5 voisins dont 3, la Zambie, la Tanzanie et le Burundi ne lui posent pas des problèmes sécuritaires. C’est avec le Rwanda et l’Ouganda que la RDC a des problèmes de sécurité, d’immigration et de pillages de ses ressources. Une meilleure gestion des frontières peut éviter à la RDC plus de la moitié de ses problèmes économiques, sociaux et sécuritaires dont la solution permettra son développement. La question des frontières doit être inscrite en priorité dans la stratégie de la défense du pays et du maintien de la stabilité dans la sous-région.
En effet, malgré des nombreuses initiatives entreprises par les gouvernements successifs de la RDC, depuis le début des années 2000 jusqu’à ce jour, le pays connait des tueries à répétition, des pillages systématiques de ses ressources naturelles par ses voisins de l’Est -référence à des nombreux rapports des experts des Nations-Unies- qui sont devenus des bases arrière des groupes rebelles nationaux et étrangers. Par ailleurs, la présence de la Mission de l’Organisation des Nations-Unies pour la Stabilisation en République démocratique du Congo, en sigle, la MONUSCO, depuis sa création, il y a une vingtaine d’années, jusqu’à ce jour, n’est pas parvenue à aider la RDC à pacifier l’Est de son territoire.
Il va de même de la Conférence Internationale
sur la région des Grands Lacs -CIRGL, créée en 2006- dont l’objectif principal
était de mettre en œuvre les conditions de paix, de sécurité, de stabilité
politique et de développement dans la région des Grands Lacs. C’est pourquoi,
je pense que pour résoudre le problème de l’insécurité dans l’Est de la RDC, en
plus des efforts pour une vraie défense et une bonne diplomatie mises à
l’épreuve par les deux dernières agressions rwandaises, l’option d’une
frontière physique par la construction d’un mur de séparation, me parait
urgente. A côté de cette option de mur de séparation, il devra être programmé
l’option complémentaire de l’inventaire et de répartition des terres entre
l’Etat et les communautés locales ainsi que leur titrisation en faveur de ces
dernières. Cette seconde option sera développée dans nos prochaines tribunes.
3. La solution du mur de séparation et sa faisabilité progressive
La RDC doit se résoudre à protéger sa frontière
Est par la construction d’un mur de séparation, principalement
pour quatre raisons évidentes:
- pacifier civilement sa population pour sauver des vies humaines en rendant sa frontière peu poreuse;
- stopper le pillage des ressources naturelles et l’occupation illégale de ses terres;
- priver aux multitudes des groupes rebelles des bases arrières grâce au contrôle de ses frontières. En d’autres termes, leurs priver des sources d’approvisionnement.
- empêcher les immigrations illégales.
A travers le monde, les cas de construction des
murs, celui de Berlin en 1961, celui en construction depuis l’administration
Trump à la frontière des Etats Unis d’Amérique et du Mexique et enfin, celui de
la barrière de séparation israélienne d’avec la Palestine en territoire
disputé, peuvent nous édifier. Une cinquantaine
d’autres pays à travers le monde y ont recouru -voir tableau 1 en annexe-, pour
diverses raisons dont les principales sont liées:
- à l’immigration illicite;
- au commerce illégal;
- à l’anti-trafic de drogue;
- au cas des territoires occupés;
- à l’anti-terrorisme;
- à l’anti-intrusion;
- au cas des zones de conflit;
- à l’anti-trafic d’armes, et enfin
- à la situation des barrières économiques.
Sur le continent Africain, comme illustration, nous pouvons citer en exemple, le mur de 500 Km construit en 2003 de commun accord entre le Botswana et le Zimbabwe pour lutter contre l’immigration clandestine. L’autre exemple est l’entente entre l’Afrique du Sud raciste et le Mozambique en 1975.
En effet, pour lutter contre l’immigration clandestine, ils ont conjointement financé et construit un mur de 120 Km. D’autres illustrations sont nombreuses sur le continent Africain. D’autres pays encore en Afrique du nord, dans certains pays du Maghreb, tels que l’Egypte et le Maroc, l’ont aussi fait.
A noter que l’attrait vers de grands ensembles pour des raisons de viabilité économique et du commerce n’est réalisable qu’avec des Etats stables. Il est quasi impossible d’obtenir l’intégration à partir du néant ou du désordre. Un pays comme la Libye déstabilisée constituerait-il un élément catalyseur de l’essor économique d’un quelconque bloc ou sous-région? Le Nigeria plongé dans la psychose de Boko Haram ou le Kenya guetté par les Shebabs seraient-ils des entités candidates à une intégration en vue d’une unification réelle du continent pour le rendre acteur de la mondialisation? C’est pourquoi, je me pose la question sur le bien-fondé, qui a poussé de manière précipitée, l’Assemblée nationale de la RDC, à approuver la ratification de l’accord de libre-échange africain dit Zlecaf, dont le fonctionnement avait commencé dernièrement.
4. Avantages comparatifs
Comparativement aux dépenses à engager pour la construction d’un mur frontalier, les avantages que la RDC aurait, sont incalculables en termes:
- d’épargne en vies humaines;
- des recettes financières grâce à la lutte contre la contrebande;
- de protection de nos espaces fonciers, miniers et forestiers… occupés illégalement par les envahisseurs;
- de protection de nos richesses minières exploitées illégalement par des groupes armés:
§ Ouganda:
15 tonnes d’or
§ Rwanda: 10 tonnes d’or
Total: 25 tonnes d’or
Cette quantité d’or représente par an une perte de 1,500 milliards de
dollars US pour la République. Ceci n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.
5. Base de calcul du coût du mur de séparation
· Volume béton pour ouvrage en pièce de 1,50 m –pour faciliter l’exécution et dont la jonction se fera à l’aide des morceaux de fer-:
– Partie au-dessus du sol:
8 m x 0,50 m x 1,50 m = 6,00 m3
– Partie sous-sol:
0,80 m x 0,70 m x 1,50 m
Total béton ouvrage = 0,84 m3
: 6,84 m3
- Prix unitaire estimatif en m3 de béton armé étant de 500 USD en moyenne;
- Coût estimatif d’une pièce de 1,50 m:
6,84 m3 x 500 USD = 3.420 USD
1 m = 2.280 USD (1)
- Prix unitaire estimatif en m3 de béton de propriété étant de 300 USD en moyenne;
- Volume béton de propriété unitaire:
0,90 m x 0,20 m x 1 m = 0,18 m3
- Coût estimatif total béton de propriété:
0,18 m3 x 300 USD = 54 USD (2)
Coût d’1 m : 2.280 USD +54 USD= 2.334 USD
Coût d’1 Km: 2.280 USD +54 USD = 2.334.000 USD
6. Coût de réalisation de la solution proposée
Coût estimatif du mur
Prévision par pays limitrophe posant problème d’insécurité:
- Rwanda – RDC: longueur 217 Km
- Burundi – RDC: longueur 233 Km
- Ouganda – RDC: longueur 765 Km
4) Soudan du Sud – RDC: longueur 628 Km
Total : 1.843 Km
- Rwanda – RDC: 217 Km:
«Mur de séparation» avec hauteur de 8 m sur la longueur totale de 217 Km -inclut
87 Km à travers les eaux du Lac Kivu et environ 60 Km de terrain montagneux
difficile à traverser dans la partie la plus
septentrionale.
L’option de construire les 217 Km
Coût estimatif du mur Rwanda-RDC: 217 Km
= 217 km x 2.334.000 USD/Km = 506.478.000 USD dont pour :
- béton pour ouvrage: 494.760.000 USD
- béton de propreté: 11.718.000 USD
L’option de construire les 70 Km: -1ère Phase-
- excluant le Lac Kivu et le terrain montagneux-
Pour tenir compte des difficultés budgétaires, je pense que le Gouvernement élu devra construire, dans une première phase, la partie la plus fragile et la plus poreuse de la frontière, 70 Km, au lieu de tous les 217 Km, qui nous sépare du Rwanda en excluant les 87 Km du Lac Kivu et les 60 Km de la partie montagneuse. -Voir la carte.
Coût estimatif du mur Rwanda-RDC: 70 Km
= 70 km x 2.334.000 USD/Km = 163.380.000 USD
dont pour:
- béton pour ouvrage: 159.600.000 USD
- béton de propreté: 3.780.000 USD
70 km: distance égale à celle se situant entre Kinshasa-Gombe et la N’Sele dans la ville de Kinshasa.
L’option de construire les 130 Km: -2ème Phase-
- excluant le Lac Kivu 217 Km – 87 Km-
Le gouvernement pourra ajouter les 60 Km de la partie montagneuse à la partie fragile et poreuse pour la construction du mur: 70 Km.
Coût estimatif du mur Rwanda-RDC: 130 Km
= 130 km x 2.334.000 USD/Km = 303.420.000 USD
dont pour:
- béton pour ouvrage: 296.400.000 USD
- béton de propreté: 7.020.000 USD
- Soudan du Sud – RDC: 628 Km -3ème phase-
Il s’agira ici de protéger nos populations du phénomène Mbororo.
Coût estimatif du mur Soudan du Sud-RDC: 628 Km
= 628 km x 2.334.000 USD/Km =1.465.752.000 USD
dont pour:
– béton pour ouvrage : 1.431.840.000 USD
– béton de propreté: 33.912.000 USD
III. Ouganda – RDC: 765 Km -4ème phase-
Coût estimatif du mur Ouganda-RDC : 765 Km
= 765 Km x 2.334.000 USD/Km = 1.785.510.000 USD
dont pour:
– béton pour ouvrage: 1.744.200.000 USD
– béton de propreté: 41.310.000 USD
IV. Burundi – RDC : 233 Km -5ème phase-
Coût estimatif du mur Burundi-RDC: 233 Km
= 233 km x 2.334.000 USD/Km = 543.822.000 USD
dont pour:
- béton pour ouvrage: 531.238.860 USD
- béton de propreté: 12.582.000 USD
Coût global pour le Nord-Est: 4.301.562.000 USD
A ce montant, nous devrions ajouter le coût des barbelés à placer au-dessus du mur, sur toute sa longueur et celui des caméras de surveillance. Il est prévu aussi une ouverture de 7 m pour le libre-échange entre les populations frontalières. Cette ouverture sera contrôlée de deux côtés de la frontière par les forces frontières de deux pays.
7. Conclusion
Suite à la perméabilité des frontières, particulièrement la frontière avec la République du Rwanda, j’estime qu’il est urgent de renforcer la sécurité de cet espace en érigeant un mur, tout en prenant le soin de laisser des points de passage comme à Kasumbalesa, à la frontière zambienne ou au Beach Ngobila avec le Congo-Brazzaville. La construction de ce mur de séparation n’est pas synonyme de rupture des relations diplomatiques qui est un problème à part, ni d’échanges commerciaux avec le Rwanda. C’est dans l’ultime souci de sécuriser nos territoires respectifs. Ainsi, une telle action historique nécessite la consultation des populations locales congolaises, par voie référendaire.
Fait à Kinshasa, le 17 juin 2022
Adolphe MUZITO
Député national et Premier ministre honoraire