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Comment Vodacom caporalise le secteur des télécoms…

Le DG de Vodacom Congo, Godfrey Motsa
Le DG de Vodacom Congo, Godfrey Motsa
Au lieu de se battre loyalement sur le marché avec tous les autres, Vodacom Congo a, lui, opté pour une autre stratégie: se battre dans les cabinets politiques pour faire couler les concurrents les plus faibles. Une politique qui ne paye pas du tout. Son dernier canular adressé au Premier ministre Matata a reçu une fin de non recevoir
Alors que les lois et autres textes réglementaires du pays prônent la compétition entre les opérateurs des télécommunications, Vodacom-Congo, lui, s’en va dans une satanée guerre d’intoxication contre Africell SA. Dans une correspondance visiblement antidatée du 23 décembre 2013 adressée au Premier ministre Matata Ponyo, la filiale de Vodafone veut se faire passer pour le bon élève de la bonne gouvernance.
Non seulement qu’elle s’en prend haineusement à son concurrent, mais elle prétend surtout donner des injonctions au Premier ministre en même temps qu’elle ignore totalement le ministre ayant les télécommunications dans ses attributions. Dégueulasse! On se croirait dans une sorte des relations entre un seigneur et un vassal. Inadmissible en Grande Bretagne -maison mère de Vodacom- ou en Afrique du Sud, pays d’origine de Godfrey Motsa, DG de Vodacom-Congo. Pire, ce courrier de l’intox a tout faux. L’objectif est visiblement de nuire à Africell. Erreur: Motsa a oublié que Matata n’est pas du genre à verser dans l’arbitraire, surtout que le secteur des télécoms et à la fois très technique et sensible.
Vodacom semble plus que jamais déterminée à empoisonner les relations d’affaires entre les opérateurs du secteur des télécommunications, et même entre le ministre des PT-NTIC et le Premier ministre. Dans une lettre adressée au Chef du gouvernement, cet opérateur se prête à un jeu très dangereux, susceptible d’envenimer la situation sur le terrain. «L’arrivée sur le marché d’Africell coïncide avec des pertes financières énormes, soit au-delà de 10 millions de dollars américains rien que pour la période couvrant le mois de décembre 2012», signale d’entrée de jeu, Godfrey Motsa, DG de Vodacom Congo. Pure intox! Comment l’arrivée d’un nouvel opérateur sur le marché peut-il occasionner des pertes aussi énormes? Il est vrai que Vodacom et d’autres opérateurs peuvent avoir constaté des baisses dans leurs recettes. C’est un fait normal. Tous les opérateurs se partagent presque le même parc abonnés. Tout à fait logique, dans ce contexte, que celui qui offre mieux au public gagne sa confiance. Le principe est connu de tous les économistes. C’est clair comme l’eau de roche!
Plus loin, Motsa tente de se jouer du Premier ministre. Il veut le mener en bateau alors que ce dernier est réputé pour ses talents en matière des finances publiques. «En effet, les pertes financières enregistrées s’accompagnent toujours de la diminution de la base imposable. Or, l’on sait que les principaux impôts payés par les opérateurs sont assis sur leurs chiffres d’affaires», tente de bricoler Godfrey Motsa pour faire asseoir ses âneries. Même les vaches en rient! Matata est un économiste avéré. Dur à cuire.
Impossible qu’il se fasse avoir par pareille farce. Les principaux impôts dont parle Motsa ne sont rien d’autre que la TVA, l’IPR et l’Impôt sur le bénéfice, hormis la taxe sur le droit d’accise. Même un élève de l’école primaire sait que la TVA n’est pas prélevée sur le chiffre d’affaire. Moins encore l’Impôt professionnel sur le revenu -IPR. Seul l’impôt sur le bénéfice tente d’obéir à ce caprice…pourvu que l’opérateur soit sincère dans ses déclarations. Inutile d’aller chercher des explications auprès des experts de la DGI. La taxe sur le droit d’accise -10%- est prélevée sur chaque carte de recharge. Rien à avoir avec le chiffre d’affaire. Or, selon plusieurs experts, avec la politique du prix plafond, le trafic sera dense et de ce fait, c’est l’Etat qui va gagner plus en termes de TVA et droit d’accise.
Loin de fléchir, le DG de Vodacom poursuit son offensive en prédisant la création des nouvelles taxes par l’Etat RD-congolais, ce qui va conduire à l’asphyxie du secteur des télécommunications. Nauséabond! Il ne faut pas cracher sur les visages des ministres ayant en leurs charges les Finances publiques et les télécommunications. Si Motsa peut se souvenir, la dernière taxe introduite par le gouvernement sur le marché des télécoms ne date pas d’hier! Pour l’heure, la politique de l’Exécutif n’est pas celle des nouvelles taxes. Le ministre des PT-NTIC se bat nuit et jour pour maximiser les recettes provenant de taxes déjà établies. C’est suffisant!
Vodacom devait par contre accompagner l’Etat à juguler la fraude énorme sur les appels internationaux entrants -USD 12 millions de perte chaque mois- au lieu de chercher à nuire des concurrents via des campagnes de sape du genre: «…dans le but de contraindre Africell à observer le prix plancher, des mesures idoines doivent être prises. Or, il se fait malheureusement que les autorités légalement chargées d’assurer l’encadrement du secteur n’arrivent pas à faire cesser la violation du prix plancher». C’est presqu’une injure. On veut insinuer une prétendue incompétence du ministre des Postes et télécommunications! Preuve: «A ce sujet, notre conviction a été renforcée à l’issue de la réunion tenue au cabinet du ministre des PT-NTIC le 19 décembre 2013.
Premièrement, la réunion a été focalisée uniquement sur les rapports que le Consortium Entreprise Telecom/Agilis entretient avec les opérateurs en mettant délibérément de côté la question épineuse relative au respect du prix plancher». Stop! Là, Godfrey Motsa se livre à un jeu horrible. Il veut empoisonner les relations entre le ministre des PT-NTIC et le Premier ministre. Ce n’est pas dans les compétences d’un opérateur privé de faire rapport au PM d’une réunion convoquée par un ministre en son cabinet de travail. C’est totalement déplacé! Mais le pire arrive: «En outre, le ministre a, de manière voilée, avoué ne pas être en mesure de prendre des sanctions à l’encontre des opérateurs qui violent le prix plancher».
Pire encore: «De ce qui précède, il ressort qu’il est, à l’heure actuelle, impossible d’amener Africell à respecter le prix plancher. C’est donc en ultime recours que nous vous saisissons à cet effet». Une véritable équipée! Le DG de Vodacom ne semble pas peser ce qu’il raconte. Nul n’a besoin de lui rappeler qu’en RD-Congo, la Constitution et les autres textes légaux déterminent les compétences de chaque membre du gouvernement. Selon la loi fondamentale donc, chaque ministre est responsable de son secteur. Le Premier ministre est là pour coordonner l’action générale du gouvernement. Pousser alors le PM à prendre des décisions en lieu et place du ministre sectoriel est plus que dangereux. C’est l’amener à violer la loi.
Prix plancher, tous marchent dessus!
Mais qui respecte le prix plancher? Pas la peine de poser une telle question. La réponse saute aux yeux. Personne! Pour se couvrir, tous les opérateurs se cachent derrière les promotions. Chez Vodacom, 100 Unités équivalent à 20 minutes de communication en intra réseau. Ce qui donne une moyenne de 5 unités par minute, alors que la décision de l’ARPTC tant décriée fixe le tarif à 10 unités la minute. Rien qu’avec 10 unités, un abonné Airtel peut s’offrir 5 minutes de communication en intra réseau. La moyenne donne 2 unités par minute. Tigo n’est pas en reste. Une campagne de communication menée avec pompe annonce le retour en force de «Allô na Allô», une pratique permettant aux abonnés de Tigo de causer presque gratuitement entre eux.
Le vrai bonheur, on le retrouve chez Orange RDC, devenue éternel Père Noël: avec 200 unités -USD 2-, vous avez 125 minutes de communication en intra réseau et 10 minutes en inter réseau! C’est qui fait une moyenne de 1,4 cents par minute de communication. Qui trompe qui? Curieux cette manie de Vodacom de s’en prendre uniquement à Africell. Le bébé aux dents longues serait-il considéré comme un maillon faible? Gênerait-il au point de pousser son pourfendeur à la bêtise? Possible.
Pour enfoncer le clou, Motsa confond le rôle et va jusqu’à donner instructions au Premier ministre: «pour ce faire, nous estimons que vous feriez œuvre utile en recommandant formellement aux régies financières -DGI, DGDA, DGRAD- d’approcher l’ARPTC pour que les droits et taxes dus à l’Etat soient collectés sur base du prix plancher». C’est dit! Vodacom veut caporaliser tout son monde voire le PM.
Ainsi est faite la relation entre un maitre et un vassal. Ambition démesurée. Avant de pousser Matata à dresser les régies financières contre Africell, Vodacom devait tout d’abord demander un redressement de sa comptabilité après sa maffia orchestrée avec la SCPT, laquelle a coûté au trésor public des dizaines des millions de dollars de perte. Vodacom devrait aussi efficacement aider l’Etat à lutter contre les sims box, un phénomène qui prive au trésor public 144 millions de dollars chaque année. L’équipée sauvage de Motsa est d’avance vouée à l’échec.
YA KAKESA

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