Culture

Tabu Ley, des hommages dignes de son rang!

Pascal Tabu Ley, le monument de la musique RD-congolaise a reçu des hommes dignes d'un Roi
Pascal Tabu Ley, le monument de la musique RD-congolaise a reçu des hommes dignes d’un Roi
C’est ce lundi 9 décembre 2013 que le corps de l’artiste musicien Tabu Ley sera mis en terre au cimetière Nécropole -Entre terre et ciel-, dans la commune de la Nsele. Décédé le 30 novembre 2013 à l’hôpital St Luc de Bruxelles en Belgique à l’âge de 73 ans, la dépouille mortelle de Pascal Tabu Ley a été rapatriée le week-end dernier à Kinshasa et exposée dans le hall du Palais du peuple où les mélomanes et autres personnalités lui rendent hommage. Plusieurs autorités du pays n’ont pas manqué de saluer la mémoire de ce monument de la musique RD-congolaise.
Hommes politiques, artistes, cadres d’entreprises, ont pris d’assaut le Palais du peuple depuis samedi soir et hier dimanche. Des délégations de différents pays sont venues partager la douleur des RD-Congolais. Plusieurs pays et provinces de la RD-Congo organisent des activités de grande envergure pour rendre un vibrant hommage à l’un des icônes de la musique africaine. Cela atteste que la notoriété du berceur national Pascal Tabu a largement dépassé les frontières. A Kinshasa, l’exécutif provincial a pris l’option de suspendre toutes les activités sportives et musicales sur la ville jusqu’à l’enterrement de Rochereau.
La preuve d’une grande ingéniosité
 
Pascal Tabu Sinamwey alias Tabu Ley est né le 13 décembre 1940 à Bagata, province du Bandundu. Il fait ses études à Kinshasa où ses parents s’établissent peu après la naissance du petit Pascal. Ses études primaires d’abord à l’école St Pierre, puis à l’école St Joseph -Paroisse Ste Anne. Tabu Ley a débuté sa carrière très jeune avant d’apporter sa modeste contribution qualitative à l’envol de la musique RD-congolaise.
Preuve: la plupart de musiciens, voire de la jeune génération, ne cessent de s’inspirer ou de recourir aux techniques et styles du Seigneur Ley. Fils de Joseph Massa et de Colette Ngo N’kum, Rochereau a un parcours élogieux. Tout en étant encore élève à l’école primaire, il intègre la chorale de la paroisse St Pierre avant de devenir plus tard choriste de son nouvel établissement scolaire St Joseph.
Lors des festivités et journées culturelles organisées par son école, Tabu Ley avait toujours l’habitude d’interpréter les chansons de Franck Lassan et Kabasele Tshamala dit Grand Kallé, rapporte Jean-Pierre Nimy, auteur du dictionnaire des immortels de la musique RD-congolaise. Ces occasions constituaient donc des moments d’essor et de découverte du jeune chanteur. «La valeur n’attend point le nombre d’années», dit-on, Pascal Tabu, en 1956, alors qu’il poursuit ses études secondaires à la bien nommée ECOMORAPH -Ecole moyenne St Raphael- fréquente assidument l’un des pères fondateurs de la musique RD-congolaise moderne, Kabasele Tshamala  dit Kalléjeef.
«Contrairement aux affirmations, Tabu Ley n’est pas l’élève de Grand Kallé. Lui-même il se définissait comme l’héritier d’Antoine Wendo Kolosoy –Mokitani ya Wendo. Il était à lui seul le créateur d’un style de chant et un compositeur original», révèle Marcel Nzazi Mabidi, journaliste-producteur à Radio Télévision nationale congolaise -RTNC.
Avant son intégration en 1959 à African Jazz, Rochereau collaborait avec cet orchestre où l’histoire nous renseigne que Tabu Ley céderait déjà ses quelques chansons à Grand Kallé. Ensuite, c’est Nico Kasanda qui a fini par facilité son intégration à African Jazz. Sa venue dans  cette formation musicale une pierre très considérable. La chanson «Keliya» est une preuve.
Cette œuvre discographique, composée par Seigneur Ley, a récolté un franc succès pendant cette période -1959- en se maintenant en première position dans les Hit-parade. C’est d’ailleurs ce titre qui l’a propulsé sur la scène musicale. Malheureusement sa collaboration avec Kallé n’a pas durée. En 1960, Ley fait un court passage à OK Jazz. Là encore, l’artiste est loin de rencontrer ses attentes. Il décide de se réfugier la même année à l’orchestre Jazz africains que venait de monter Edo Lutula, avant de passer entre 1960 et 1961 à African Jazz, cette fois-ci Aile Nico.
En 1962, Rochereau et autres dont Roger Izeidi, Dr Nico, Manu Dibangu, Dechaud Mwamba… réintègrent Africa Jazz après avoir résolu le problème avec Kabasele Tshamala. Ses compositions connaissaient toujours du succès. C’est le cas des titres tels que : «Bonbon sucré», «Emilie, Bolingo», «Masanga ya libota», «Succès ya African Jazz», etc. Finalement, Tabu Ley  a résolu de créer son propre groupe. L’année 1970 demeure une période ayant consacré l’artiste, souligne un observateur. Rochereau s’est produit en cette année, pendant une semaine, à la prestigieuse salle mythique Olympia de Paris. En lever de rideau est programmé le chanteur français Julien Clerc.
Il était donc le premier musicien africain à se produire dans cette salle. C’était un honneur et une fierté pour les RD-Congolais. Signalons par ailleurs que la mémoire du Seigneur Ley d’être salué par les RD-congolais étant donné qu’il fait preuve d’une grande ingéniosité à travers sa musique. Tabu Ley est le premier à faire entrer la batterie -drums- à la musique RD-congolaise où il impose le rythme «Soum Djoum». Les titres «Silikani», «Mundi», «Selija», «Londende», et autres  Illustrent bien cela. Mais certaines informations nous renseignent qu’en 1961, Grand Kallé utilisait déjà la batterie, avant de l’abandonner rapidement. Mais personne ne pourrait contester que l’auteur de la chanson «Mokolo na kokufa» a transformé les productions scéniques des musiciens RD-congolais. C’est le premier à apporter une autre touche dans la chorégraphie avec «les rocherettes».
«Pascal Tabu Ley est le premier à rompre avec la musique de cabaret où les gens viennent uniquement pour boire et danser. Cette façon de faire trouve un écho auprès de ses collègues et devient une pratique coutumière de presque tous les groupes de musique de la RD-Congo», souligne Jean-Pierre François Nimy, à travers l’une de ses publications.
Un autre temps fort marquant le couronnement dans la carrière musicale de Ley est sa collaboration avec un autre grand de la musique qui n’est rien d’autre que Franco Lwambo Makiadi dans «Lisanga ya ban ganga», qui a également connu la participation de Michelino Mavatiku. Ensemble, ils on signé un disque comprenant les œuvres de deux gros poissons de la musique RD-congolaise moderne. Plusieurs artistes musiciens ont bénéficié de l’encadrement de Rochereau. En illustration, Mbilia Bel en est parmi ceux-là. Cette chanteuse a été encadrée pendant plusieurs années par Seigneur Ley. Elle a signé plusieurs titres à succès grâce à l’icône de la rumba odemba. Pascal Tabu Sinamwey était pour Marie Claire Mboyo allias Mbilia Bel ce que Koffi Olomide l’est pour Cyndi Le cœur en terme d’encadrement artistique.
Tabu Ley est parti, mais restera toujours parmi nous non seulement à travers ses chansons de haute facture, mais aussi grâce à ses enfants qui évoluent dans la musique, notamment Péguy Tabu, le célèbre rappeur Yossoupha…
La dernière prestation de l’illustre disparu sur la scène musicale  en tant que chanteur c’était en juin 2008 à Cuba. A la tête d’une forte délégation RD-congolaise, il a participé au festival international de musique de Varadero, une ville touristique de l’île de Cuba, où il a obtenu un prix. Après avoir mis un terme à sa carrière musicale pour se consacrer en politique, même si cela n’a pas été de définitive, Tabu Ley a occupé la fonction de vice- gouverneur de la ville Kinshasa, puis ministre provincial de Kinshasa en charge de la culture. Il fut également député provincial de la même ville.
L’artiste est mort, vive l’artiste !
 
Patrick NZAZI

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