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La valse des musiciens RD-congolais dans les milieux carcéraux devient inquiétante

L’admission de l’artiste musicien Antoine Agbepa Koffi Olomide au Centre pénitentiaire de Makala défraie la chronique tant en RD-Congo qu’en dehors des frontières nationales. La renommée de cette icône de la musique RD-congolaise s’en trouve sérieusement écornée au regard des motifs qui l’ont précipité dans ce chaudron. Poursuivi pour coups et blessures sur l’une de ses danseuses à l’Aéroport international Jomo Kenyata, à Nairobi, où son groupe venait de débarquer pour une production dans la capitale touristique kenyane, Koffi Olomide s’est attiré les foudres du ciel lorsque les éléments audiovisuels de son agression sur une femme, une faible créature désarmée, ont été balancés sur les réseaux sociaux.
Aussitôt mise au parfum de cette violation flagrante, la députée kenyane Joyce Lay, un des fers de lance de la lutte pour les droits des femmes et animatrice principale du Gender based violence -violence basée sur le genre-, a pris ce dossier à bras le corps jusqu’à obtenir des sanctions conséquentes contre le musicien RD-congolais. En deux temps trois mouvements, déclenchement de la procédure de flagrance avec comme résultat: confiscation du passeport de Koffi Olomide, annulation du visa lui accordé, arrestation et expulsion du territoire kenyan.
Comment le «Quadra Kora man» est-il tombé si bas?
La suite est connue. Plainte auprès des instances judiciaires de Jeannine Mabunda Lioko, conseillère du Chef de l’Etat Joseph Kabila en matière des violences sexuelles, lobbying du député Zacharie Bababaswe et d’autres dirigeants de divers secteurs d’activités humiliés par ce comportement inadmissible et récidiviste, mise en branle de l’appareil judiciaire sous l’impulsion du Procureur général de la République et atterrissage en catastrophe du leader de Quartier latin à la prison centrale de Makala. Ce vendredi matin, l’intéressé sera présenté devant les juges. Comment le «Quadra Kora man» est-il tombé si bas? L’on croit savoir que cet artiste qui a pourtant porté haut le flambeau de la RD-Congo sur les scènes de plusieurs continents, n’en serait pas à son premier forfait. Son acte tant déploré commis dans un espace international aussi fréquenté soulève moult questions sur le comportement des patrons d’orchestre vis-à-vis de leurs musiciens. Il faudra peut-être remonter jusqu’au déluge, dans son enfance pour essayer de comprendre ce genre de travers. Et pourtant, Koffi Olomide demeure dans la catégorie restreinte des musiciens RD-congolais ayant mené de brillantes études universitaires. De par sa notoriété, c’est une personne qui devrait s’entourer des services d’éminents juristes pour se placer à l’abri des réactions épidermiques pouvant servir de bouillons de culture propice à des procès en cascade. Voilà que remontent brutalement à la surface les images de l’agression perpétrée à Paris sur le chroniqueur musical Marc Tabu, fils biologique de l’icône Pascal Tabu Ley Rochereau. Là aussi, le natif de la commune de Lemba avait pété les plombs. Hélas!
Des rapports humains exécrables aux antipodes des règles de bienséance
Pour revenir aux rapports humains entre les patrons des orchestres RD-congolais et leurs sociétaires, autant avouer que dans la plupart de cas, ils sont exécrables et aux antipodes des règles de bienséance et respect des droits humains et libertés fondamentales, voire socioéconomiques. Aujourd’hui, les langues se délient pour fustiger la sale manie de certains leaders des groupes artistiques d’user et d’abuser des danseuses, surtout pendant les voyages tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Combien parmi ces jeunes créatures disposent d’un contrat de travail en bonne et due forme? Combien d’entre ces filles connaissent leurs droits, ne fût-ce que les prescrits du Code du travail? Elles ne se sentent nullement protégées et subissent parfois les fantasmes de leurs patrons sans rechigner au risque de perdre leurs maigres pitances. Sous d’autres cieux, elles seraient même offertes en pâture pour travailler à l’horizontal et ramener quelques pièces sonnantes et trébuchantes dans l’escarcelle du patron. Disons-le sans ambages. Les patrons des orchestres RD-congolais se comportent en véritables dictateurs qui n’acceptent aucune contradiction de la part de leurs employés dès lors qu’ils ont pris position sur une question donnée. Jouer une autre partition en dehors des leurs équivaut tout simplement à un crime de lèse-majesté et passible de sanctions exemplaires, dont l’expulsion du groupe sans indemnités compensatoires.
Quand «Hélène» et «Jackie» envoient Luambo et ses musiciens à Makala
Pour qu’Antoine Agbepa déverse publiquement sa bile sur la pauvre danseuse et de manière aussi sauvage, cela sous-entend des antécédents à ce genre d’égarement. Alors que se passe-t-il lorsqu’ils se retrouvent seuls loin des caméras, des yeux et oreilles indiscrets? Heureusement que les réseaux sociaux sont des médias hors norme qui émettent sans discontinuer pour alerter l’opinion en tout temps et en tout lieu. Les écarts de comportement des musiciens RD-congolais ne datent pas d’aujourd’hui. Si les uns trouvent normal d’exercer leurs talents pugilistiques sur le sexe faible, d’autres, par contre, ont eu à défrayer l’actualité par des comportements indigestes portant atteinte aux valeurs morales, spirituelles et culturelles positives. Les mélomanes se souviennent des démêlés de Luambo Makiadi Franco avec la justice en 1979. Pendant que les œuvres de Tabu Ley cartonnent et caracolent en tête de tous les hits parades, le patron du TP OK Jazz lance sur le marché des bandes audio reprenant deux chansons fétiches d’une grande valeur artistique, mais dont le contenu au bas de la ceinture heurte la morale. Il s’agit de: «Hélène» et «Jackie». Mobutu frappe à travers Kengo. Luambo et tous ses musiciens se retrouvent à la prison centrale de Makala. Cela coupe l’herbe sous les pieds de beaucoup d’autres esprits tordus.
Likinga, Shungu, Nyoka et Evoloko au «gnouf»!
La course à l’argent facile envoie un autre chanteur de charme dans les geôles italiennes. Likinga Mangenza Redo et un ancien parlementaire effectuent un voyage lucratif en Europe en transportant de la drogue dans leurs bagages. La police des frontières découvre le «mvuki». Verdict sans appel, prison d’une demi-dizaine d’années. Un commerce juteux fait tabac, celui des «ngulu». Des jeunes gens obtiennent des visas des pays européens grâce à la notoriété des orchestres ayant pignon sur rue, moyennant décaissement de fortes sommes d’argent, et se retrouvent comme des cheveux dans la soupe dans les délégations des orchestres RD-congolais. Cette activité connexe propulse deux autres icônes entre les quatre murs de la prison. D’un côté, Jules Shungu Wembadio de Viva la Musica passe quelques mois en France au «gnouf» pour trafic d’êtres humains. Ce qui lui fera perdre beaucoup de biens, notamment une maison en France. De l’autre côté, Jossart Nyoka Longo Mvula de Zaïko Langa Langa purge sa peine dans un pénitencier à Bruxelles. Il faut attendre une intervention substantielle des autorités RD-congolaises pour les sortir des griffes de la justice française et belge. Mais ceci n’efface en rien l’ardoise salée que les deux stars laissent dans les finances de la compagnie aérienne nationale. Pour une autre affaire de mœurs, Antoine Evoloko Lay Lay viole une fille mineure. La justice RD-congolaise frappe de nouveau. Plusieurs mois de réclusion à la prison centrale de Makala. A sa sortie de prison, ses amis improvisent même une caravane motorisée comme si l’acte commis était anodin. Voilà les travers de la société RD-congolaise. Les gens sont toujours prêts à pardonner même des actes ignobles.
Lavage des cerveaux tordus qui se démarquent de la morale
A l’allure où vont les choses, si l’on n’y prend garde, d’autres vedettes du monde musical risquent de se signaler par des dérapages porteurs de fortes atteintes aux valeurs de la République. Autant, il est demandé à la justice RD-congolaise d’examiner l’affaire Koffi Olomide sans parti pris pour que des sanctions appropriées et exemplaires lui soient infligées, autant il convient de faire le ménage dans les ensembles musicaux et autres assimilés. Il est plus que temps de procéder au lavage des cerveaux tordus de tous ceux qui se démarquent de la morale. Tout comme il est plus que temps que la fameuse commission de censure fasse correctement son travail en débarrassant l’univers musical des animateurs et œuvres qui l’avilissent à travers les propos et actes d’antivaleurs.
Tino MABADA

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