La Majorité présidentielle incarnée par la plateforme électorale dénommé le Front commun pour le Congo -FCC- dont la Charte a été ouverte à la signature depuis le 1er juillet 2018 était à la recherche d’un oiseau rare pouvant arborer ses couleurs à la prochaine présidentielle. A 5 mois de l’organisation du scrutin, le climat était monté à travers le pays. Les yeux de tous étaient braqués sur Joseph Kabila, président de la République arrivé fin mandat, pour voir s’il respectera la Constitution en renonçant à briguer un troisième mandat et en désignant son dauphin. L’attente a été longue mais le suspense a été levé mercredi 8 août lorsque Lambert Mende Omalanga, porte-parole du gouvernement et signataire de la charte du FCC, a annoncé à la presse la désignation d’Emmanuel Ramazani Shadary comme candidat président du FCC à la prochaine présidentielle. Personne ne l’avait vu venir même s’il est compté parmi les fidèles des fidèles.
Mercredi 8 août dans l’après-midi, à quelques heures seulement de la fermeture de bureau de réception et de traitement des candidatures -BRTC-, tout le monde était suspendu à l’annonce que fera Joseph Kabila sur la désignation de son dauphin. La rencontre de Kingakati à la veille mettait l’opinion en alerte. Lambert Mende Omalanga, porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication et des Médias, a eu l’insigne honneur de faire communication à la presse dévoilant ainsi le nom de l’oiseau rare qui représentera le Front commun pour le Congo -FCC- à la prochaine présidentielle. Tout le monde comprend alors que Joseph Kabila ne briguera pas le troisième mandat, il a respecté la Constitution. Les réactions pleuvent au niveau national et international. Kabila a franchi le premier pas.
A Kinshasa, pour se conformer à la charte du FCC, les sociétaires accompagnent leur candidat président à la CENI déposer son dossier de candidature. Sur toutes les lèvres et dans les réseaux sociaux, les commentaires pullulent, chacun y va de sa manière. Le plus intéressant semble être celui qui parle de Shadary comme un politique conciliant. Selon certains analystes, Kabila s’est accordé plus ou moins deux ans pour le coacher. Patron des groupes parlementaires PPRD et Majorité présidentielle pendant toute la législature 2011-2016, Shadary a été promu tour à tour vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur et Secrétaire permanent du PPRD, après avoir pris une part active aux dialogues de la Cité de l’Union africaine et de la CENCO avec les forces de l’Opposition.
Qui est Ramazani Shadary?
Nommé vice-premier ministre de l’Intérieur et Sécurité en remplacement de son camarade et collègue du PPRD Evariste Boshab à la faveur du l’Accord politique issu du dialogue facilité par le Togolais Edem Kodjo, Emmanuel Shadary s’est résolu d’entreprendre des actions visant à baliser le chemin à l’organisation des élections. Il l’a bien souligné lors de la cérémonie d’échange des vœux avec les cadres et agents de son ministère en février 2017. Pourtant, il ne savait pas encore que c’est lui qui sera choisi par Kabila pour lui succéder à la présidence.
«Je connais les rouages de la territoriale pour les avoir arpentés et fréquentés. Je peux vous affirmer que j’en connais les difficultés, les inégalités et les contraintes et je sais apprécier les tractations», avait-il déclaré au personnel qui réclamait l’amélioration des conditions sociales. Sans tomber dans des vaines promesses, Shadray avait appelé tout le monde à apporter sa pierre à l’accomplissement des missions assignées à cette vice-primature en charge de l’Intérieur notamment assurer la sécurité, sauvegarder la cohésion sociale et s’impliquer dans l’organisation des élections.
«J’invite tout le monde pour que notre administration puisse jouer le rôle important dans les élections qui pointent à l’horizon. Pout tout cela, nous avons besoin d’une bonne administration des territoires, nous avons besoin d’une bonne sécurisation du cycle électoral», avait-il souhaité le 9 février 2017. Et aujourd’hui, il se trouve au centre de ces élections.
L’homme a vu le jour le 29 novembre 1960, soit 5 mois après l’accession de la RD-Congo à l’indépendance dans l’actuelle province de Maniema. Il est originaire du territoire de Kabambare, circonscription électorale qui l’a élu député national en 2006 et en 2011 pour le compte du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie -PPRD.
Doctorant en Sciences politiques, Licencié en Sciences politiques et administratives de l’Université de Lubumbashi et détenteur d’un diplôme d’études approfondies dans le même domaine à l’Université de Kinshasa, Shadary a été assistant à l’ISDR et à l’ISC Kindu de 1992 à 1994, puis Directeur général et co-fondateur de l’ISTCA-Secteur privé à Kalemie. A partir de 1995, il est élu secrétaire général de la Société civile du Maniema et en 1997, vice-gouverneur du Maniema sous M’zee Laurent-Désiré Kabila, puis gouverneur de la même province en 1998. A la mort de M’zee, Shadary est reconduit au poste de gouverneur par Joseph Kabila en 2001.
Il va alors participer à la création du parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie -PPRD- au sein duquel il exercera les fonctions du secrétaire national chargé du processus électoral et de président de la Commission de discipline. C’est ainsi qu’il sera élu député à deux reprises comme indiqué ci-haut.
A l’Assemblée nationale, Shadary a eu à casser les motions de l’Opposition parlementaire contre les membres du gouvernement comme il y était président du Groupe parlementaire PPRD et coordonnateur de la Majorité présidentielle. Il a aussi initié la saisine de la Cour suprême de la justice -CSJ- pour interpréter l’article 70 de la Constitution qui stipule: «le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Le Président de la République reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau Président élu».
En sa qualité de vice-premier ministre de l’Intérieur, Shadary a également défendu la révision de la loi électorale en y insérant le seuil de représentativité à 1% pour la députation nationale et l’augmentation de la caution pour décourager les candidatures fantaisistes.
Il a été relevé de ses fonctions du VPM de l’Intérieur pour assumer celles de secrétaire permanent du PPRD. C’est ainsi qu’il a sillonné toutes les provinces du pays pour redynamiser le PPRD sur base de ses nouveaux statuts.
Dauphin de Kabila, Shadary aura à affronter les figures de proue de l’Opposition à la présidentielle dont Félix Tshisekedi, Jean-Pierre Bemba et Vital Kamerhe, son ancien camarade du PPRD.
Octave MUKENDI
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