C’est un gros chantier auquel va devoir s’attaquer Kinshasa pour pouvoir avoir accès à l’appui financier de la Banque africaine de développement -BAD-, a expliqué jeudi Freddy Matungulu, administrateur représentant six pays d’Afrique centrale, notamment le Congo, le Burundi, la RCA, le Cameroun, le Tchad et la République démocratique du Congo. Rendant compte de la mission d’informations qu’il a conduite à Kinshasa et au cours de laquelle il a pu échanger avec les plus hautes autorités du pays, Matungulu a déclaré qu’une fenêtre d’opportunités est ouverte pour que la République démocratique du Congo obtienne un appui financier important de la BAD. À son avis, Kinshasa doit profiter de l’alternance politique et de la perspective d’un partenariat sérieux en cours de négociation avec le FMI pour mettre en confiance partenaires au développement et investisseurs. «Il s’agit pour la RD-Congo d’arrêter les hommages aux potentialités du pays pour se focaliser sur la transformation des potentialités en richesses pour améliorer le bien-être du peuple», a insisté l’administrateur de la BAD. À la suite des discussions entamées fin octobre à Washington avec le ministre des Finances, Sele Yalaghuli, une importante mission du FMI a séjourné dans la capitale RD-congolaise en vue de préparer un programme intermédiaire, prélude à un programme formel vers mi-juin 2020. En vertu du principe selon lequel les phénomènes sociaux sont les phénomènes totaux, l’appui de la BAD ne saurait qu’être subordonné aux prochains accords avec le FMI pour des gages de sérieux. «La BAD n’intervient pas dans n’importe quelle condition», a prévenu le professeur. On doit s’assurer que l’aide de la BAD, comme celle tous les autres partenaires financiers, aura réellement un impact social et économique. D’où cette exigence à la bonne gestion, à l’amélioration de l’efficacité du fonctionnement des structures de l’État. Selon Matungulu, l’appui budgétaire passe par des grandes réformes liées entre autres à l’amélioration du climat des affaires, à une bonne administration de la justice, aux facilités d’accès aux crédits… À ce jour, le pays ne peut accorder qu’entre 3 et 4 milliards des crédits à l’économie, soit moins de 10% du PIB. Il faut aussi accroître la capacité de mobilisation des ressources. La République doit prouver qu’il est capable de mobiliser le maximum des ressources pour espérer avoir l’aide des partenaires au développement. Actuellement, la pression fiscale se situe autour de 10% alors que les institutions ne sont pas bien positionnées en matière de lutte contre la corruption. «Les interventions de la BAD vont s’accroître si les réformes sont lancées et maintenues sur la bonne voie», a encore assuré Matungulu.
Grands projets et réformes
Par ces interventions, il faut entendre l’appui budgétaire en 2020, davantage de projets sectoriels dans le cadre du nouveau Document de stratégie pays. Les parties ont survolé les grands projets. Parmi ceux dont le lancement est imminent: le projet l’entreprenariat jeunes dans l’agriculture de 56 millions de dollars, le projet prioritaire de sécurité aérienne chiffré à 104 millions de dollars et la réhabilitation de la RN1 entre Kinshasa et Kikwit évaluée à 70 millions de dollars. Au nombre des projets en discussion: Inga 3, pont route-rail Kinshasa-Brazzaville et complexes agro industriels. Outre les réformes suggérées et les grands projets, les échanges entre la mission de la BAD et les autorités du pays ainsi que la société civile, le patronat et les partenaires ont tourné autour du développement des infrastructures et des capacités institutionnelles du pays, la diversification de l’économie et la relance du secteur agricole ainsi que la redynamisation du secteur privé, créateur des emplois et nouvelles opportunités de revenus pour les populations. Kinshasa a, pour sa part, confirmé sa volonté d’assurer la bonne conduite des négociations avec le FMI en vue de la mise en place d’un programme de réformes soutenu par cette institution et qui servira de cadre rassurant pour les autres partenaires au développement.
AKM