Samedi, sur son compte Twitter, Acaj, l’ONG de Maître Georges Kapiamba, a annoncé que la Cour constitutionnelle “a déclaré inconstitutionnels, tous les arrêts rendus par le Conseil d’Etat, pourtant la cour suprême administrative de la République Démocratique du Congo, dans le contentieux électoral ayant opposé Aimé Bokungu à César Limbaya”.
Dans son tweet, Kapiamba a précisé que Limbaya est d’office confirmé Gouverneur élu de la Mongala.
La Cour constitutionnelle est allée au-delà de ses compétences de ne contrôler que les actes parlementaires et administratifs, en enlevant, aujourd’hui au Conseil d’État, certainement demain, à la Cour de cassation, leur caractéristique de Cour suprême, créant subitement un nouveau droit, une nouvelle Constitution en République Démocratique du Congo en jugeant de de la constitutionnalité des actes judiciaires, le cas de récents arrêts du Conseil d’État.
Un scandale du siècle, pour la toute première sortie de celui qui a déposé le professeur Kaluba Dibwa, pourtant spécialiste en droit constitutionnel. Tel arrêt, s’il est appliqué, remet en cause et enterre définitivement l’idée de l’état de droit prôné par le Président de la République et magistrat suprême, Félix Tshisekedi.
Le nouveau président de la Cour constitutionnelle, Dieudonné Kamuleta Badibanga, a en effet pris à contre-pied le prestigieux discours de la rentrée judiciaire 2021-2022 de la Cour constitutionnelle, consacré aux tendances jurisprudentielles de cette haute juridiction, véritable tableau de bord, pourtant clairement cosigné par son prédécesseur, Dieudonné Kaluba, le Procureur général Jean Paul Nkokesha et le bâtonnier national Tharcisse Matadi Wamba, dans lequel le trio a écrit, noir sur blanc, que les décisions judiciaires ne relèvent pas de la compétence de la Cour constitutionnelle.
Le trio a aussi ajouté que la Doctrine jurisprudentielle de la Cour constitutionnelle renseigne que la Cour n’est pas compétente pour connaître des recours contre les actes juridictionnels. “La compétence de la Cour en cette matière est procédurale et formelle et ne vise pas à connaître du fond de la contestation. En ce sens, la Cour n’exerce pas un contrôle de constitutionnalité sur l’acte juridictionnel, mais joue son rôle d’assurer la cohérence de l’ordre juridique, et de permettre ainsi la coexistence des ordres juridictionnels dans un contexte pluri législatif”, ont expliqué Kaluba Dibwa, Mukolo Nkokesha et Matadi Wamba.
Et, à cette occasion, Kaluba a dû épingler l’abondante jurisprudence de la Cour constitutionnelle, évoquant entre autres les dossiers R.Const.002/0082 en inconstitutionnalité de l’arrêt rendu le 13 mai 2015 sous RCA 4211 par la Cour d’appel de Matadi, sous R.Const.004/151/TSR en inconstitutionnalité du jugement RP0659/11 par le Tribunal militaire de garnison de Lubumbashi et R.Const.0035/086 en inconstitutionnalité du jugement RP17829/I du 22 avril 2008 du Tribunal de paix de Kinshasa/Lemba.
Vivement une intervention du Président de la République en vue de corriger cette monstruosité !
La décision de la Cour constitutionnelle d’annuler les arrêts du Conseil d’État, qui constituent des décisions judiciaires, fait jaser. Des questions fusent depuis. La principale est celle de savoir sur quelle Constitution et quelle Loi de la République Démocratique du Congo la Haute Cour a pu s’appuyer pour s’octroyer ces nouvelles attributions. La seconde vise à savoir ce qui adviendrait si le Conseil d’État décidait, lui aussi, d’annuler les décisions de la Cour constitutionnelle prise comme un service public du pouvoir central?
Dans le monde politique, la posture de la Cour constitutionnelle fait susciter des doutes sur son impartialité et sa capacité à dire le bon droit en cas d’un éventuel contentieux électoral dans le cadre de la présidentielle.
Dans le monde scientifique, des voix s’élèvent pour demander l’implication personnelle du Président de la République, Félix Tshisekedi, en vue de corriger cette bourde, cette grossière erreur matérielle.
“Son Excellence Félix Tshisekedi, Chef de l’État et garant du bon fonctionnement des institutions, est prié de retourner rapidement ces arrêts monstrueux de la Cour constitutionnelle pour correction de cette monumentale et inacceptable erreur matérielle”, a plaidé samedi un expert en droit et avocat au barreau de Kinshasa/Matete.
Instituée par la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006, la Cour constitutionnelle coïncide avec l’éclatement de la Cour suprême de justice (CSJ) en trois juridictions autonomes: Cour constitutionnelle, Cour de cassation et Conseil d’État.
Tino MABADA