Fort d’«expériences de gestion des épidémies par le passé», de ses «ressources humaines» et des «matériels» acquis pendant la période de Coronavirus, le pays de Muyembe, selon des experts en santé, est taillé pour affronter une nouvelle crise sanitaire similaire à celle de 2020
Des experts RD-congolais du secteur de la santé ont décrypté, à la faveur d’une table ronde tenue le mardi 29 août 2023, la riposte du pays à la crise sanitaire de la Covid-19 ayant durement frappé le pays en 2020. Animée par Jean-Marc Matwaki, cette table ronde a réuni le Dr. Lionel Muyuku, expert en promotion de la santé, le Dr. Jean-Lou Atamboutou, médecin superviseur au Centre médical Diamant et chef d’hospitalisation à la section Gombe de cet établissement hospitalier, puis le Dr. Patrick Egbende, médecin du gouvernement affecté au Centre de traitement Covid-19 aux Cliniques Kinoises. Avec eux, le Dr. Richard Kitenge, chargé des opérations et logistiques de l’équipe médicale de la RD-Congo au ministère de la Santé. Ces têtes pensantes ont, en l’espace de 90 minutes, évoqué les forces et faiblesses de la riposte du pays ainsi que les leçons tirées de cette crise sanitaire ayant vivement secoué la planète entre fin 2019 et fin 2020.
A l’entame de la table ronde, le Dr. Richard Kitenge a circonscrit le contexte de la découverte du premier cas de Covid-19 en RD-Congo, reconnaissant dans la foulée que sa «gestion a été problématique» à cause notamment d’un défaut de «surveillance». «On a eu du mal à retracer les contacts et à les suivre. Si la maladie avait juste été détectée et qu’on avait retracé tous les contacts, qu’on les suivait à domicile avec une certaine restriction des mouvements pour ces cas contacts, la maladie pouvait être contenue dans un quartier ou une famille donnée», a argué le Dr. Kitenge, alors que le Dr. Lionel Muyuku a estimé que le pays a eu «beaucoup de chances» dans sa riposte contre la Covid-19.
«La crise Covid est arrivée au moment où nous sortions de l’épidémie d’Ebola. Ce qui fait que nous étions plus ou moins rodés», a soutenu ce médecin spécialiste en promotion de la santé, tout en déplorant ce «grand défaut de communication qui a amené de l’incertitude au sein même de la population» ainsi que «la non implication directe du niveau opérationnel» au début de la riposte. Ces facteurs ont provoqué «un faible engagement communautaire au début déjà de la crise et un déni de la population».
De son côté, le Dr. Atamboutou a déploré la non prise en compte de «l’aspect culturel» dans la communication déployée par le gouvernement pour sensibiliser au sujet de la Covid-19. «On devrait impliquer certains acteurs qui jouent un rôle important pour cet aspect: les confessions religieuses, les chefs coutumiers, etc.», a-t-il souligné, avant de laisser au Dr. Kitenge le soin de détailler les facteurs à la base des difficultés éprouvées par la RD-Congo pour lancer une offensive à la hauteur de ce virus mortel. «On sortait à peine de l’épidémie d’Ebola. Tout ce qu’on a utilisé, ce sont les gestes de la riposte contre l’épidémie d’Ebola. Mais en réalité, ce n’est pas la même épidémie, ni le même virus. Quoi que ces épidémies soient toutes des zoonoses, la stratégie de riposte ne peut pas être calquée sur Ebola. C’est à cause de ça que les choses ont été un tout petit peu désorganisées», a avancé le Dr. Richard Kitenge. Et de souligner: «Avec l’élaboration du plan de contingence qui a suivi, la situation s’est stabilisée».
Les différents intervenants à cette table ronde ont tous soutenu que la RD-Congo, à l’instar de l’ensemble de la planète, n’était pas préparée à affronter la pandémie de la Covid-19 quoi qu’elle dispose d’un «plan multi-risque» élaboré par son ministère de la Santé. Ils ont également soutenu que «la Covid-19 était un fait nouveau, pas seulement pour la RD-Congo mais aussi pour le monde».
La nouveauté de ce «phénomène» n’a cependant pas empêché la RD-Congo de déployer une stratégie de riposte bâtie sur des facteurs efficaces, salués par les intervenants. Au nombre de ces facteurs, «la création d’une tripartite: la task-force présidentielle, la commission gouvernementale et le secrétariat technique de riposte -STR-», la «volonté politique des dirigeants» d’en finir avec la Covid-19, la «nomination par ordonnance présidentielle du Dr. Jean-Jacques Muyembe» à la tête du STR, le «fonctionnement de façon assez multidisciplinaire du STR», le «système de surveillance épidémiologique», «l’attitude proactive» dans la prise en charge des patients… Forte d’«expériences de gestion des épidémies par le passé», de ses «ressources humaines» et des «matériels» acquis pendant l’ère Covid, la RD-Congo, ont affirmé les quatre experts en santé, est taillée pour affronter une crise sanitaire similaire à celle de Covid-19.
Il faudra, pour ce faire, pérenniser les expériences et connaissances acquises puis utiliser à bon escient les matériels acquis.
LOI
