Depuis l’invalidation de sa candidature par la Commission électorale nationale indépendante -CENI-, Jean-Pierre Bemba est au cœur des débats houleux qui alimentent les échange dans les salons huppés et autres espaces publics où ça parle politique. Les avis divergent. Les analystes se divisent. Deux courants émergent. Un courant est convaincu que le leader du MLC a définitivement été condamné par la Cour pénale internationale -CPI- pour subornation des témoins. Les défenseurs de ce courant s’appuient sur l’arrêt rendu par la Cour le 8 mars, confirmant la condamnation de Bemba pour «des faits très graves planifiés avec son ancienne équipe de défense et certains proches collaborateurs».
Selon eux, l’affaire a exclusivement été renvoyée auprès des juges de première instance pour la révision de leur copie sur la détermination de la peine. «Il est donc question pour les juges de déterminer et de justifier quelle peine attribuée à Bemba et cie au vu de la gravité du délit», avancent-ils. A les en croire, Jean-Pierre Bemba risque de retrouver sa cellule au quartier pénitentiaire de La Haye. Ici, ils rejoignent RFI qui, le jour même de la dernière audience de Bemba à la CPI à ce sujet, soit le 4 juillet 2018, avait publié: «Si les juges suivent les recommandations de la procureure de la CPI, l’opposant congolais pourrait retourner en prison pour quelques mois, Jean-Pierre Bemba ayant été officiellement arrêté en novembre 2013 pour subornation des témoins».
Un autre courant est plutôt d’avis que l’ancien vice-président RD-congolais, acquitté à la surprise générale en juin 2018 dans la principale affaire portant sur les crimes contre l’humanité perpétrés par sa milice en République Centrafrique, n’a pas été condamné. Une sous-branche de ce courant estime en plus que la condamnation de Bemba est suspensive, car l’affaire a été portée en appel. «Il n’y a plus condamnation en attendant la tombée du verdict», argumentent les tenants de ce courant. Ça fait débat.
Cinq ans de prison requis contre Bemba
On reproche à Bemba d’avoir influencé 14 témoins et d’avoir manipulé certaines preuves écrites. Une attitude qui aurait joué en sa faveur pour bénéficier de l’acquittement en appel. Procureure de la CPI, Fatou Bensouda a requis 5 ans de prison contre le chairman et sa suite pour ce qu’elle qualifie de «crime d’atteinte à l’administration de la justice». La culpabilité de Bemba a été établie le 19 octobre 2016 par la Chambre de première instance VII. «La Chambre conclut en l’existence de motifs substantiels de croire, au regard des preuves à charge, que les cinq accusés avaient commis des infractions de subornation de témoins -article 70-1-c du Statut-, de production d’éléments de preuve faux -article 70-1-a du Statut- portant atteinte à l’intégrité et à l’efficacité des procédures devant la Cour», avaient énoncé les juges dans leur arrêt rendu.
Et, le 22 mars 2017, Jean-Pierre Bemba, hormis l’affaire principale, a été condamné à payer une amende de 300.000 Euros et à purger une peine totale d’un an d’emprisonnement. Un délai qui ne devrait pas être déduit du temps passé en détention pour l’affaire principale. Mécontent, Bemba a interjeté appel qui, au terme de l’audience du 8 mars 2018, a été rejeté et la plupart de sanctions confirmées.La dernière audience s’est tenue le 4 juillet en attendant le prononcé des juges, fixé au 17 septembre 2018. La représentation de la CPI à Kinshasa a, mercredi 29 août, éclairé la lanterne de l’opinion en signifiant que la séance du 17 septembre est strictement consacrée à la fixation des peines pour les 5 condamnés dans l’affaire de subornation de témoins. La peine pour subornation de témoins, à en croire les spécialistes du droit, ne peut aller au-delà de 5 ans de servitude pénale. De l’avis de ceux-ci, le cas Bemba présente une certaine gêne étant donné que le régime de détention ne doit pas être en décalage avec l’infraction. «Pour une infraction passible de 5 ans d’emprisonnement, l’ancien vice-président de la RD-Congo a déjà purgé 10 ans de détention quoi que dans l’affaire principale. C’est probablement en raison de ces considérations tout à fait techniques que Jean-Pierre Bemba, à la rigueur, ne pourrait être condamné qu’à quelques mois de détention supplémentaire», font remarquer ces experts. Dans les médias, on évoque une peine de six mois de détention. Au 17 septembre, lumière sera faite.
Laurent OMBA
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