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Présidentielle 2018: Kin-Kiey tourne la page Kabila

A la surprise générale, Tryphon Kin-kiey Mulumba, ancien ministre des PT-NTIC, fondateur du Parti pour l’action -PA- et de l’ASBL Kabila Désir, muée par la suite en parti politique, a créé la sensation mardi 07 août en concrétisant des ambitions longuement retenues de briguer la magistrature suprême par le biais du dépôt de sa candidature à la présidentielle de décembre 2018. Kin-Kiey, chantre des prouesses et actions accomplies par Joseph Kabila Kabange depuis son avènement au pouvoir, a posé un acte perçu à la fois comme un courage exceptionnel et un divorce d’avec la famille présidentielle. «Le FCC n’a pas une offre crédible. Je n’ai jamais signé sa charte. Je me porte comme indépendant», a déclaré KKM après le dépôt de sa candidature, soutenue par son propre label, le Mouvement ENACE -Entendre, apprendre, comprendre et entreprendre. La page Kabila est tournée.
 
Les ambitions, sommes toutes légitimes, Tryphon Kin-kiey Mulumba les a nourries bien avant la date du 7 août 2018 qui l’a vu déposer son dossier en bonne et due forme au bureau de la CENI en vue d’entrer en lice pour l’élection présidentielle du 23 décembre 2018. Dimanche 5 août 2018, il a, de manière à peine voilée, annoncé les couleurs et affiché ses perspectives. Dans le microcosme politique, personne n’a pu décoder cette communication, le secret ayant été soigneusement gardé. Seul un cercle restreint, accédant au saint des saints de l’initiateur de Kabila Désir, a été mis au parfum de la nouvelle voie dans laquelle KKM a choisi de s’engouffrer. «L’Opposition presse le Président de la République de déclarer un dauphin. Outre qu’on s’interroge sur le sens de cette démarche qui s’éloignerait de la démocratie, je me demande comment cela pourrait se faire sans frustrations nouvelles voire fracture au sein de la plateforme», a tweeté Kin-Kiey ce dimanche-là.


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Le Rubicon franchi
Lundi 6 août, 100.000 dollars de caution sont payés à RawBank, le dossier du candidat inattendu à l’élection présidentielle était déjà fin prêt, l’information a commencé à filtrer et à se répandre… Et, mardi, à la surprise générale, Kin-Kiey s’est pointé devant le Bureau de réception et de traitement des candidatures de la CENI pour se faire enregistrer non pas au starting block de la députation nationale -un mandataire s’est chargé de le faire à Masimanimba où il a été réélu en 2011-, mais plutôt de l’échelon le plus élevé, celui de la magistrature suprême.
Chantre des prouesses et actions accomplies par Joseph Kabila Kabange depuis son avènement au pouvoir, Kin-Kiey vient de poser au grand jour un acte perçu non seulement un courage exceptionnel de sa part mais surtout comme un divorce d’avec la famille présidentielle dont il a toujours porté haut et fort l’étendard, un coup de massue à la cohésion interne de cette plateforme. Il a ainsi franchi le Rubicon tournant de ce fait la page Kabila.


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A la ligne de départ de la compétition présidentielle, le fondateur de Kabila Désir se présente certes en indépendant, mais nullement dépourvu d’armature solide. Sa candidature est appuyée par un label créé avec l’ancien gouverneur de l’Equateur Jean-Claude Baende, le Mouvement Entendre, apprendre, comprendre, entreprendre -ENACE- dont il est le président et qui, selon KKM, propose «une offre politique nouvelle marquée par l’écoute et l’action en vue du redressement nécessaire de la nation».Le 23 décembre, Kin-Kiey va présenter à la table des délibérations des arguments autrement solides contre ceux du camp de son désormais ancien leader, Joseph Kabila Kabange, ainsi que ceux du candidat issu des rangs de la Majorité présidentielle élargie au Front commun pour le Congo -FCC.
Le pouvoir en place premier fossoyeur des projets de développement
«J’ai créé Kabila Désir, il y a 3 ans, parce que je croyais qu’il y avait une envie de Kabila. J’ai appelé la Majorité à s’unir autour de ce projet. Elle a refusé. C’est une majorité parlementaire qui aurait pu s’opposer à une réforme», a, dans un élan de frustration, déclaré KKM après avoir déposé sa candidature. Aussitôt l’opération d’enregistrement bouclée, Kin-Kiey a publié un communiqué de presse à travers lequel il estime que «l’action menée depuis une dizaine d’années a été forte mais a manqué une puissance transformatrice. Beaucoup de projets de développement ont été combattus de manière farouche ou ont manqué de pertinence». Et de dénoncer: «les plus fortes actions de contestation et d’affaiblissement sont venues du sein de la classe politique au pouvoir qui a littéralement refusé paradoxalement d’accompagner l’action et de l’assumer».
Premier vice-président de la plateforme l’Alliance des bâtisseurs pour un Congo émergent -ABCE-, signataire de la charte du FCC, Kin-Kiey a trouvé la nouvelle recette politique concoctée par le Président Kabila inopportune et l’a déclinée en refusant, à titre personnel, de signer sa charte. «Je ne crois pas beaucoup dans le FCC. Je ne vois pas ce que ces nouvelles personnalités apportent à la MP. Elles ne sont pas crédibles», se convainc l’ancien ministre des PT-NTIC. Puis: «Le FCC n’a pas une offre crédible. Je n’ai jamais signé sa charte»
Exposé à des «mesures appropriées conséquentes»
De l’avis de KKM, l’élargissement mathématique d’une plateforme pose la question de la crédibilité de l’offre et de la cohésion. «Le gap de cohésion a atteint un tel niveau d’ahurissement qu’il a littéralement anéanti le rythme, la cohérence et la puissance de l’action publique», a-t-il constaté, proposant, de ce fait, de «recréer un consensus fort».
A en croire ce professeur en journalisme détenteur d’un doctorat en Sciences politiques, sa révolution n’est ni revancharde ni destructrice des acquis dont la RD-Congo a besoin. «Le Congo doit entreprendre pour se redresser et construire une vision qui incarne le rêve de ses fils et filles», a-t-il insisté non sans énumérer les premières actions d’urgence et d’envergure à mener. Au nombre de ces actions, l’école, la formation, l’apprentissage, l’intelligence, l’aménagement, les technologies, les infrastructures, l’eau, l’électricité, le système de santé. Son rêve est de faire de la RD-Congo «le pôle de sécurité, de stabilité, d’innovation, d’attractivité, le hub d’imagination et d’intelligence» en Afrique.
La candidature de Kin-Kiey a été vivement fustigée par l’ABCE, sa plateforme, qui, par ailleurs, «désapprouve et condamne cette démarche aux antipodes de sa position sur la question de la candidature à la présidence de la République».


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Le point de non-retour
A peine est-il passé à l’acte que l’élu de Masimanimba ploie déjà sous la menace de «mesures appropriées conséquentes» par sa plateforme qui annonce la tenue d’une réunion extraordinaire de la conférence des présidents. «On va demander à la CENI d’invalider tous les candidats de ses partis alignés aux provinciales sous les couleurs de l’ABCE. On va également lui retirer notre mandat», a prévenu Jean-Marie Bulambo, l’un des ténors de l’ABCE. Une odeur de fatwa flotte en l’air.
Ces mesures, aussi fortes et restrictives ou d’auto-exclusion soient-elles, ne vont certainement pas contraindre KKM à faire marche arrière après avoir osé. Il est clair que Kin-Kiey a atteint le point de non-retour qui lui interdit toute volte-face. Fuite en avant, défection, distraction, volonté de prendre ses responsabilités et de s’assumer pleinement?… Telles sont les questions qui restent au cœur des débats dans les milieux sociopolitiques.
Toujours est-il que cet acte courageux et téméraire pour une certaine opinion, l’expose désormais aux coups de boutoir de certains communicateurs de la Majorité présidentielle non contents de voir l’un des ténors quitter le bateau en pleine marée haute. «Ce fondateur de Kabila Désir pousse sa volupté un peu loin que dans ses habitudes. Avant même de connaître le désir de celui qu’il a semble-t-il désiré, le voilà dans ses désirs qu’il voudrait nous voir désirer. Nenni, le désir de Tryphon se limitera dans sa parcelle de Télécom», a posté Papy Tamba dans différents forums de discussion sur whatsapp.
Laurent OMBA

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