Paix armée dans la capitale cuprifère, où l’ambiance est redevenue au beau fixe entre les amis brouillés pendant plusieurs mois. Le président de SCODE a fait le déplacement du gouvernorat provincial pour rencontrer son ex-rival. Une page tumultueuse est tournée!
Enterrer la hache de guerre et sceller une réconciliation durable au nom de la cohésion provinciale et nationale. C’est le tour de force qu’ont réussi depuis 72 heures Moïse Katumbi Chapwe et Jean-Claude Muyambo Kyassa et concrétisé jeudi 24 avril au siège du gouvernement provincial du Katanga. Selon des sources à Lubumbashi, Muyambo a fait le déplacement du gouvernorat pour formaliser un rapprochement négocié dans la discrétion la plus totale. Sans nul doute, un armistice pour tenter de clore définitivement une séquence désastreuse qui a duré de longs mois.
Pour un peu, on s’en frotterait les yeux. Officiellement, Katumbi et Muyambo scellent leur réconciliation sous couvert de «cohésion». Mais il ne faut pas que le court terme gâche le long terme! Banale manière de dire que la paix est revenue… mais c’est une paix armée, sous haute surveillance: Muyambo, le franc-tireur, est-il devenu un agneau du jour au lendemain? Certains dans le camp de Katumbi doutent, mais de façon anonyme. N’empêche. Coups de fil, médiations et préliminaires secrets ont ouvert la voie à la rencontre en tête-à-tête de ce jeudi 24 avril à Lubum’, suivi d’un bref entretien auquel des proches ont eu accès, notamment le sérail du gouverneur et quelques membres du staff de SCODE. Le premier acte officiel de la réconciliation a vécu.
Le gong d’un nouveau départ est donné et une nouvelle saison, lancée. Muyambo s’est dépassé. Il a demandé et obtenu une audience officielle dans les bureaux du Gouv’. Il s’y est personnellement rendu, visiblement décidé de mettre fin à une séquence qui a fait de lui l’homme le plus conflictuel et impopulaire de la ville cuprifère.
«Je suis venu voir mon frère», a-t-il déclaré au sortir de l’audience. La presse, incrédule, va lancer une question d’insistance à peu près en ces termes: «Après tout ce qui s’est passé?» Même réponse de l’interviewé: «Vous pouvez dire tout ce que vous voulez, je suis venu voir mon frère». Le ton et le temps ont changé. Finie l’ère de petites phrases et de coups bas. Dans les deux camps, un facteur déterminant a exigé l’un et l’autre à faire preuve de bonne volonté: la cohésion, devenue le leitmotiv de tout le pays.
Grandeur d’âme et ses qualités d’homme d’Etat
Loin de les affaiblir, ce rapprochement ragaillardit ces deux figures de la scène politique. La manœuvre était délicate et le choix, pas du tout aisé pour les deux acteurs: faire le premier pas et prendre le risque d’être taxé de faiblesse ou camper sur ses positions et prendre le risque d’être accusé de réfractaire à la cohésion.
Muyambo, le premier, sait que Katumbi est extrêmement populaire à Lubumbashi et s’entêter à l’affronter, c’est accepter de se suicider, se carboniser politiquement.
Pas de déclaration à la presse côté Katumbi. Communiquer, c’est aussi le silence. Après avoir essuyé des tirs en dessous de la ceinture, le Gouv’ a affiché l’attitude d’un bon père de famille, prêt à accorder le pardon à un enfant repenti.
Si, à l’occasion, il a laissé parler sa grandeur d’âme et ses qualités d’homme d’Etat, il reste convaincu que ses fonctions l’exposent à toutes les critiques, mêmes les plus virulentes, mais pas à la désinformation, moins encore à l’intoxication. «Refuser la main tendue du bâtonnier aurait paru comme une insensibilité de la part du gouverneur, contraint de se comporter en père de famille, donc de fédérer tous ses administrés», a commenté un analyste avant d’ajouter: «Ce qui ne tue pas, rend plus fort». Il a donc fallu un dépassement de soi. L’un a envoyé des signaux à l’autre et le reste s’est avéré simple formalité. Petite visite, grands effets attendus. Pourvu que ça dure longtemps.
AKM

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