Deux caciques du régime Kabila, Kalev Mutondo et Emmanuel Ramazani Shadary, ne font désormais plus partie de la liste des sanctionnés de l’Union européenne -UE-, a annoncé le lundi 19 juin 2023 un communiqué de cette organisation regroupant les pays du vieux continent. Ancien administrateur général de l’Agence nationale des renseignements -ANR-, Kalev Mutondo s’est retrouvé, avec Ramazani Shadary, sur la liste d’une quinzaine de personnalités du régime Kabila frappées en 2016 par des mesures restrictives de l’UE «en raison de leur implication dans des violations des droits de l’homme et de leur rôle dans l’entrave au processus électoral de 2018».
Ces sanctions ont été prononcées au crépuscule du second et dernier mandat constitutionnel de Joseph Kabila, laissant le goût d’une pression exercée sur l’ancien président RD-congolais afin de le contraindre à quitter le pouvoir.
Sept ans plus tard, Shadary et Kalev se retrouvent seuls bénéficiaires de la décision du Conseil de l’UE portant levée de ces sanctions, prise «à la lumière des arrêts pertinents du Tribunal de mars 2023». Les sanctions leur infligées comportaient notamment l’interdiction de voyager à l’étranger et un gel des avoirs financiers.
Ilunga Kampete, Gabriel Amisi Kumba, Ferdinand Ilunga Luyolo et Célestin Kanyama, alors respectivement commandant de la Garde républicaine, commandant de la force terrestre des FARDC, commandant de la LENI -une unité anti-émeutes- et chef de la police à Kinshasa, demeurent sous le régime des sanctions. Ils y ont été admis pour avoir «contribué en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme». A ce quatuor s’ajoutent John Numbi, Roger Kibelisa et feu Delphin Kahimbi, accusés d’avoir «fait obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’état de droit».
Des années après, de l’eau a certes coulé sous les ponts, mais les conditions semblent demeurer pour de nouvelles sanctions de l’UE, à en croire son communiqué du lundi dernier. «Le Conseil continuera à suivre de près la situation en RD-Congo. Il est prêt à inscrire sur la liste toute personne qui fait obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, qui est impliquée dans de graves violations des droits de l’homme ou dans des atteintes graves à ces droits, ainsi que les personnes responsables d’entretenir le conflit armé, l’instabilité et l’insécurité ou d’inciter à la violence», a prévenu l’UE dans ce communiqué. Et d’ajouter: «Le Conseil est également prêt à inscrire sur la liste ceux qui exploitent la fragilité de la situation en RDC, notamment en exploitant des ressources naturelles et des espèces sauvages ou en en faisant le commerce de manière illicite».
Pendant ce temps, le décor semble planté pour une nouvelle crise politique au pays, favorisée notamment par la répression des manifestations de l’Opposition, les restrictions des mouvements des adversaires politiques du Président Félix Tshisekedi ainsi que les arrestations arbitraires des opposants. La dernière aux cendres encore chaudes est celle de l’opposant Franck Diongo, cueilli mardi 20 juin 2023 à Kinshasa alors qu’il revenait d’un deuil. Trois semaines plus tôt, c’est le bras droit de Moïse Katumbi, réputé adversaire farouche de Tshisekedi, qui a «violemment» été arrêté par des éléments des renseignements militaires sur le tarmac de l’aéroport de N’Djili. Salomon Kalonda est accusé de tentative de coup d’état au profit d’un ressortissant katangais. Franck Diongo serait de connivence avec le spécial de Katumbi.
Ce décor pousse d’aucuns à entrevoir des sanctions contre les hiérarques du régime en place qui brillent, selon l’Opposition, par des violations répétées des droits de l’homme. Des accusations rejetées en bloc par l’Union sacrée affirmant que l’Etat de droit est plus que jamais de mise en RD-Congo sous l’ère Fatshi.
Toutefois, l’UE, dans son communiqué, a tiré la sonnette d’alarme avant de passer aux actions punitives, tant elle demeure soucieuse de «soutenir la lutte contre l’impunité en RD-Congo afin de traduire en justice les auteurs de graves violations des droits de l’homme. Cela est essentiel pour les victimes, pour une paix et une sécurité durables et pour une bonne gouvernance inspirée par l’État de droit».
Ya KAKESA