L’homme d’affaires est accusé d’avoir agi au nom d’une société fantôme et acquis contre 5 millions de dollars les immeubles et tanks de la Société congolaise de pétrole et la Société de pétrole du Katanga à la faveur d’une vente aux enchères irrégulière favorisée par le Tribunal de commerce de Lubumbashi malgré les preuves de l’inexistence de Ghasby Corp BVI fournies par le Guichet unique…
Mécontentements dans les milieux d’affaires à Lubumbashi où il est fait état d’un scandale judicaire au cœur duquel se trouve un autre sujet libanais bien connu, Ibrahim Ahmad Assaoui, patron de Socimex.
Des sources à Lubumbashi ont révélé que cet homme d’affaires tente d’escroquer la Société congolaise de pétrole -SCP- et sa sœur, la Société pétrolier du Katanga -SPK-, filiales de la firme suisse Trafigura, 35 milliards USD de chiffre d’affaires par an. Installées à Lubumbashi depuis 2008, SPC et SPK sont spécialisées dans la distribution des produits pétroliers. Dix ans après le lancement de leurs activités, Ibrahim Ahmad a commencé à écrire à la maison mère Trafigura via un avocat libanais basé à Beyrouth pour réclamer des millions de dollars à SCP et SPK.
Selon une Note technique des responsables de ces sociétés transmises aux plus hautes autorités de la Justice et des services de sécurité, Ibrahim Ahmad Assaoui prétend avoir usé de ses relations solides locales pour “ouvrir les portes de la RDC et du Katanga à ces investisseurs”. Et, “pour ce faire, il réclame, en contrepartie, la valeur de la moitié de l’ensemble de l’investissement réalisé, soit 49% de la valeur actuelle de ces sociétés qu’il fixe unilatéralement à 27 milliards de dollars”.
Suivant la même Note technique, Ibrahim Ahmad Assaoui utilise dans cette action une société du nom de Ghasby Corp BVI qui, selon lui, détiendrait les droits réclamés à SCP et SPK, alors qu’aucun contrat ne le sous-tend et le seul protocole invoqué par Ibrahim dit autre chose, outre qu’il est soumis au droit anglais et donne compétence aux juridictions anglaises en cas de litige.
Plus grave, Ghasby Corp BVI, avec laquelle Ibrahim Ahmad Assaoui agit conjointement en Justice, s’avère une nébuleuse. Il a été prouvé que cette société radiée au Registre de commerce des Îles Vierges britanniques en 2009 et dissoute en 2016. La preuve de sa radiation est apportée par une copie du Journal officiel des Îles Vierges britanniques. En témoigne un courrier du Guichet unique daté du 15 juin 2019 portant suite à la demande de renseignements formulée par les avocats de SCP et SPK. “La société Ghasby Corp BVI n’a aucune immatriculation au Registre du commerce et du crédit immobilier (RCCM) tenu par le GUCE et est par conséquent totalement inconnue dans la base des données informatisées de celui-ci. Se lançant dans la recherche aux fins de la vérification de l’existence de la société Ghasby Corp BVI à l’étranger, le GUCE est arrivé au résultat que cette société avait été créée et immatriculée au Registre du commerce des Îles Vierges britanniques en 2007, mais elle en a été radiée depuis le 2 novembre 2009, puis dissoute d’office sept ans plus tard, soit en 2016, conformément à la législation en la matière des Îles Vierges britanniques qui la régissait”, a écrit le DG du GUCE, Amisi Herady.
Instrumentalisation de la Justice et graves atteintes sur le climat des affaires
Incapable de faire marcher Trafigura et n’ayant aucun moyen d’agir devant un tribunal étranger, Ibrahim Ahmad a porté plainte devant une juridiction à réputation sulfureuse, le Tribunal de commerce de Lubumbashi, où la SPC et la SPK sont condamnées à payer 27 millions de dollars à Ibrahim Ahmad Assaoui. “Une instrumentalisation de cette juridiction et des graves atteintes sur le climat des affaires au moyen d’une utilisation extrêmement abusive des magistrats comme moyen de pression dans une discussion commerciale entre parties”, s’indignent les responsables de SCP et SPK.
Une indignation justifiée étant entendu que les plaignants Ibrahim Ahmad Assaoui et Ghasby Corp BVI n’ont apporté aucune pièce ou aucune justification fondant leurs réclamations.
Les sociétés SPC et SPK ont vite saisi la Cour de cassation pour dénoncer ce jugement inique et solliciter un renvoi de juridiction. Désignée pour ce faire, la Cour d’appel de Kalemie a annulé la décision du Tribunal de commerce de Lubumbashi et débouté Ibrahim.
Coup de théâtre peu après mi-décembre: le Tribunal de Commerce de Lubumbashi est étrangement revenu à la charge le 18 décembre 2019 pour se passer du verdict de la Cour d’appel de Kalemie et ordonner la saisie et la vente aux enchères des biens immobiliers de SCP et SPK sis Quartier Bel Air. Les tanks y compris leur contenu n’ont pas été épargnés.
Le pot aux roses est découvert après cette vente irrégulière: l’acquéreur des biens de SCP et SPK contre 5 millions de dollars s’appelle Ibrahim Ahmad Assaoui. “Tout s’est passé en un seul jour, le vendeur a été lui-même le repreneur”, a relaté lundi un employé de la SPC inquiet pour son job menacé et la survie de sa famille.
Un drame judiciaire avec à la manoeuvre Ibrahim Ahmad Assaoui, réputé fort en République Démocratique du Congo après des débuts difficiles dans le secteur du diamant à Lunda en Angola où il servait le café aux clients de ses anciens patrons proches de Jonas Savimbi.
Le Président Fatshi et le PM Ilunga interpellés!
Convaincus de l’inexistence juridique prouvée de Ghasby Corp BVI et de l’incapacité de sieur Ibrahim Ahmad Assaoui d’agir en justice pour une société inexistante et pour une créance qu’il ne sait prouver, SPC et SPK sont allées en appel devant la Cour d’appel de Lubumbashi, où l’affaire est enregistrée sous RUA 185 et RUA 186. Ils attirent l’attention des magistrats sur la nécessité d’encourager les investissements, au lieu de décourager les efforts économiques des nouveaux dirigeants. Les sociétés SPC et SPK en appellent dès lors à la protection des autorités supérieures, les seules fondées pour protéger les droits légitimes des investisseurs. Le Président de la République Félix Tshisekedi, le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba ainsi que le ministre d’État en charge de la Justice Tunda, engagés dans la lutte contre la corruption et les antivaleurs, sont principalement interpellés.
Surtout que selon certaines indiscrétions, l’avocat choisi pour plaider en faveur de la société fantôme Ghasby est soupçonné d’être aussi avocat de Hezbollah.
En attendant de vérifier si Ibrahim Ahmad Assaoui, propriétaire de Ghasby Corp BVI, est aussi lié au groupe terroriste visé par Washington, il est important de rappeler
que les États-Unis ont promis d’autres sanctions contre tous les Libanais et les RD-congolais soupçonnés d’avoir des rapports avec Hezbollah.
KISUNGU KAS