Près de 50 jours après sa nomination, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka vient de publier son gouvernement. Une équipe de 55 membres au total, dont 6 vice-premiers ministres, 10 ministres d’État, 24 Ministres, 4 Ministres délegués, 10 Vice Ministres.*
Qu’en dire
– Du temps pris pour les consultations en vue de la formation du Gouvernement;
– De la structure et du profil des membres du gouvernement;
– De la représentation de la femme;
– De la Représentation nationale;
– De l’investiture devant le parlement;
– Mais aussi des défis multiples, des plus urgents à ceux à moyen termes
1. Du temps pris pour les consultations en vue de la formation du gouvernement
On entend dire que la sortie du gouvernement Suminwa a pris beaucoup de temps. A peu près une cinquantaine de jours, et du coup des comparaisons acerbes avec la situation au Sénégal et au Tchad ont fusée de partout. Il faut d’abord savoir chaque État, par rapport à sa constitution, mais aussi, c’est important de les souligner, à sa culture politique, peu prendre un temps assez long pour la formation du gouvernement, pourvu que le fonctionnement des institutions avancent dans le sens de résoudre le problème de développement du pays dans les différents secteurs nationaux de manière satisfaisante. Cela se passe dans l’histoire politique de l’Allemagne, de la Belgique, d’Israël et voire même de l’Espagne. Donc ne faisons pas de la fixation sur des détails de forme. Il faut donc aller à l’essentiel.
2 . De la structure et du profil des membres du gouvernement.
Il faut d’emblée constater et relever que le gouvernement de Judith Suminwa Tuluka est moins pléthorique que ceux de Sama Lukonde 1 et 2, d’une dizaine des départements. C’est peu dégraissage, diront des observateurs sévères, mais les Chinois répliqueront par un proverbe célèbre: «même un voyage de mille kilomètres commence toujours par un premier pas». C’est déjà mieux annoncer les couleurs dans le sens du souci d’une gestion saine et sombre des finances publiques au milieu de tant des défis qui attendent son gouvernement.
Certes l’on a entendu certains s’offusquer de ce que certains individus du gouvernement Sama 2, ayant peu d’estime de l’opinion publique aient été nommés également ministres. L’explication tient au fait que la configuration des dernières élections législatives de décembre 2018, ont produit une majorité fragmentée au niveau du parlement, aboutissant à une majorité plurielle, avec comme conséquence politico-institutionnelle la nécessité de former un gouvernement de coalition. On le sait, les chefs des partis politiques et regroupements sont des hommes d’une certaine longévité politique, et intransigeants sur le partage des postes. C’est sans doute aussi cela la politique. Mais certains ministres des plus décriés ne sont pas revenus, et, sans qu’il soit besoin de les nommer ici, une bonne chose.
3. De la représentation de la femme
C’est en fait la première fois depuis l’accession de la République démocratique du Congo à l’indépendance politique qu’une femme, en l’occurrence Judith Suminwa Tuluka, est à la tête du gouvernement en qualité de Première ministre et par conséquent chargée de la conduite de la politique du gouvernement de la République. Par ailleurs l’on compte sans coup férir 17 femmes ministres, à tous les niveaux de présence protocolaire du gouvernement, allant de vice-premiers ministres, aux ministres d’État, et mêmes des ministres et vice-ministres.
De mémoire d’observateurs, rarement une formation de l’institution gouvernement, y compris en occident, n’a fait une telle largesse à l’approche genre, ainsi qu’à la représentativité de la femme dans les institutions publiques demeure. En sus de la Primus inter pares (la première parmi ses égaux), donc la Première ministre, son gouvernement compte 18 femmes au total. S’agit-il d’une revanche d’anthologie que Judith Suminwa Tuluka, en tant que femme, veut prendre sur l’histoire politique de la RDC dont les membres ont toujours été très largement que des hommes? Nenni!
Le profil genre, avec une grande participation de femmes au gouvernement, répond à la foi des engagements internationaux de la RDC, mieux appliqués en l’espèce par une femme, à qui on appliquera à tort l’adage: la charité bien ordonnée commence par soi-même. En effet, la RDC a signé et ratifié la convention relative à l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979, émanant de la résolution 34/180 de l’Assemblée générale des Nations-unies du 18 décembre 1979.
N’ayant pas limiter ses consultations aux partis et regroupements politiques, Judith Suminwa, Première ministre et cheffe du gouvernement, en droite ligne avec le credo du Président de la République et Chef de l’État sur la participation significative de la femme congolaise aux fonctions dans les institutions constitutionnellement consacrées, avait élargi ses consultations aux mouvements associatifs des femmes, peut être conscient du fait que les femmes étaient à l’endroit dès le commencement des partis et regroupement politiques, et qu’il fallait les chercher là où elles se trouvaient de manière plus assumée comme membres à part entière de la société avec droit de participation à gouvernance politique du pays. Sa méthode de travail a donc produit des fruits attendus.
4. De la Représentation nationale
L’équilibre géopolitique est globalement respecté avec la présence de différentes zones linguistiques dans cette équipe gouvernementale, ce qui représente une réponse aussi bien à l’exigence constitutionnelle qu’au souhait exprimé par plusieurs regroupements politiques ainsi que les organisations de la société civile lors des consultations menées par la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, en avril dernier.
5. De l’investiture devant le parlement
C’est sans doute que le gouvernement Suminwa sera investi, bien évidemment après audition et présentation du programme d’action devant les élus du peuple aux fins de lui en donner acte. Le parlement et le gouvernement Suminwa sont deux âmes dans une même poitrine, elles ne se ressemblent pas, et elles n’ont pas la même histoire, mais elles sont dans la même poitrine, et elles battent à l’unisson, deux âmes dans une même poitrine, c’est nous, disait MANN.
6. Des défis multiples, plus urgents et moyennement
Les défis sont multiples:
– Juguler l’insécurité dû à l’agression de la RDC par le Rwanda et ses supplétifs
– La diversification de l’économie nationale
– L’accès aux besoins sociaux de base
– La création de l’emploi et la protection du pouvoir d’achat des ménages
– La stabilité de la monnaie et le renforcement de l’efficacité du service public.
En dépit du retard, le gouvernement Suminwa devra se mettre très rapidement au travail.
Ardent Kabambi
Juriste et Analyste politique