Dossier à la UnePolitique

Vidéo de tuerie au Kasai: "montage", réagit le gouvernement; l'ONU enquête

Le gouvernement de la République démocratique du Congo a qualifié samedi de “montage” une vidéo sur laquelle enquête l’ONU et qui met en cause l’armée congolaise dans un massacre de civils dans une province troublée.
« Ce sont des montages ridicules. Quelle est cette armée qui accepte de filmer comment elle tue ? » a déclaré à l’AFP le porte-parole du gouvernement congolais Lambert Mende, à propos de cette vidéo non authentifiée.
« C’est l’oeuvre de personnes au bout du rouleau. C’est trop grossier et ridicule », a ajouté M. Mende, « c’est digne d’un montage de film de Rambo ».
La vidéo, qui dure un peu plus de sept minutes, a été transmise vendredi soir à l’AFP par un spécialiste du Congo, selon qui elle aurait été tournée le 11 ou le 12 février, alors que des informations non confirmées faisaient état de 50 à 100 morts dans des affrontements entre l’armée congolaise et la rébellion Kamwina Nsapu dans le sud de la province du Kasaï central.
Samedi, elle circulait et était abondamment commentée sur les réseaux sociaux. Un examen des données associées à la vidéo n’a pas permis à l’AFP de déterminer la date de réalisation des images, ni le lieu du tournage.
Le porte-parole de la Mission de l’ONU au Congo (Monusco) n’avait pas pu être joint samedi en début d’après-midi, mais selon des sources au sein de la mission onusienne, celle-ci enquête sur cette « vidéo et d’autres allégations » en relation avec ce qui se passe dans les trois provinces du Kasaï.
Le 11 février, la Monusco avait exprimé son inquiétude face à la persistance de la violence dans cette région du centre de la RDC et dénoncé « les atrocités commises par les miliciens Kamwina Nsapu » tout comme « un usage disproportionné de la force par les Forces armées de la RDC (FARDC) », qu’elles avaient appelées « à agir dans le respect des normes acceptables du droit national et international ».
A en juger par sa qualité, la vidéo semble avoir été tournée à l’aide d’un téléphone portable par un membre d’une unité militaire de huit soldats en treillis parlant lingala (la langue en usage dans l’armée congolaise) et swahili (langue parlée dans l’Est du Congo).
« Vous mourez pour rien »
Elle montre le petit détachement marcher sur un chemin vers un groupe de personnes à quelques dizaines de mètres chantant en tshiluba (langue parlée au Kasaï) « Notre terre, notre terre ».
Puis un ordre : « Avancez ! tirez ! ». Le peloton ouvre alors un feu nourri et progresse sans avoir besoin de s’abriter : personne ne réplique en face. Le feu cesse. Les hommes s’avancent et achèvent plusieurs personnes gisant au sol, en commençant par une femme, et insultent les cadavres, tiennent des propos obscènes en contemplant le sexe de deux femmes gisant à terre. La caméra s’attarde longtemps sur l’une d’elle en train d’agoniser. « Vous mourez pour rien, pour rien », dit un homme.
« Ici nous sommes au village Mwanza-Lomba, nous les avons croisés aujourd?hui. Nous leur avons prouvé que la force reste à la loi. Ils sont nombreux mais on va les poursuivre jusqu?à l?infini », commente la personne qui tourne les images.
Mwanza-Lomba est situé au Kasaï-oriental, entre Mbuji-Mayi, capitale de cette province, et Kananga, la capitale du Kasaï-central voisin. La région est le théâtre depuis septembre d’une rébellion provoquée par un conflit entre le pouvoir central et un chef coutumier local, Kamwina Nsapu, tué en août lors d’une opération militaire.
La vidéo montre pas moins de vingt cadavres. Les femmes ont laissé échapper en tombant une balayette. Quelques hommes, certains la tête ceinte d’une tresse de liane, tiennent encore un lance-pierre ou un bâton.
« FARDC toujours au rendez-vous, voilà, nous faisons notre travail », continue le commentateur, qui cite à un moment le nom d’un officier supérieur censé commander les opérations dans le secteur.
Partie du Kasaï-Central, la rébellion Kamwina Nsapu a progressivement gagné le Kasaï-oriental et le Kasaï-occidental. Les violences commises dans ce conflit ont fait au moins 200 morts.
Avec AFP et Jeune Afrique

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page