Dossier à la UneNation

Ces vaches et éleveurs qui suscitent l’émoi dans le Kwilu et Kwango : Muzito a rencontré Tshibala

Accompagné de son collègue élu de Masimanimba Floribert Luboto, le député de Kikwit est parti à la rencontre des habitants de Kwango et Kwilu, de plus en plus préoccupés par la présence massive des troupeaux venus de l’Est. Les leçons de cette mission ont été au menu de sa rencontre avec le Premier ministre ce lundi.
Le climat est tendu dans l’ex-Bandundu, à l’Ouest de la RD-Congo. A la base: la présence de nombreux troupeaux conduits par des centaines d’éleveurs venus de l’Est de la RD-Congo, les réactions que leur présence suscite dans l’opinion, ameutée par les alertes de certains hommes politiques membres de l’Opposition dans les réseaux sociaux et les SOS lancés par diverses couches sociales de l’ex-BDD.
En janvier, sur Twitter, l’opposant Martin Fayulu évoque la présence dans les environs de Kinshasa et dans le Kwilu, notamment à Masamuna et Vanga, des individus non RD-congolais. Réunis en assemblée générale le 27 janvier à Kinshasa, les professeurs d’universités ressortissants de la province du Kwango lancent un cri d’alarme en direction des autorités provinciales et nationales quant à la présence d’un groupe de personnes à provenance et à identité inconnues dans la province du Kwango, indiquant que ces personnes sont accompagnées des troupeaux des vaches dont la race n’existe pas dans la région et seraient en voie de s’installer dans les environs de Bukangalonzo, certains d’entre elles se dirigeaient vers Nsakala-Mbewa et d’autres vers Popokabaka.
Le débat fait rage. Député réélu de Masimanimba, le professeur Tryphon Kin-kiey Mulumba a ces mots le 4 février sur Twitter: «La traversée de ces troupeaux pas fait nouveau. Ils viennent de Kahemba via la nationale pour les abattoirs de Kin. Ce qui surprend ce jour c’est leur nombre impressionnant. Développer ce commerce inter-provinces n’est pas prohibé. On verra si l’arbre cache la forêt et pourquoi».
Pendant que la présence massive de ces vaches et éleveurs vraisemblablement partis de l’Est surprend au point de susciter l’émoi populaire, les alertes données en janvier coïncident avec la rumeur persistante de la commercialisation de la viande empoisonnée. Le 5 février, à l’issue d’une mission à Kwango, le ministre de la Pêche et Elevage Daniel Paluku dément et appelle la population à consommer cette viande, précisant que les vaches trouvées sur les sites inspectés dans le Kwilu et le Kwango sont en bon état et en bonne santé. «Ces bêtes appartiennent à des Congolais, principalement des éleveurs de Kalemie. Leurs propriétaires comptent les revendre dans la ville de Kinshasa, devenue un marché florissant», tente d’apaiser le ministre Daniel Paluku.
Désastre écologique en vue   
Rien n’y fait. L’inquiétude persiste. Dans certaines agglomérations kwiloises et kwangolaises, la tension est perceptible. La population gronde. Député élu de Kikwit et premier ministre honoraire, Adolphe Muzito ne résiste pas à ces cris populaires. Accompagné de son collègue élu de Masimanimba Floribert Luboto, il part à la rencontre des habitants de Kwango et Kwilu, de plus en plus préoccupés par cette affaire des vaches errantes. «Notre souci était de récolter les informations sur la provenance de ces bétails et évaluer l’impact de leur présence dans les contrées de l’ex-Bandundu», explique Floribert Luboto à AfricaNews.
Après avoir pris langue avec le gouverneur du Kwango, le maire de Kenge ainsi que quelques autorités traditionnelles, le Premier ministre honoraire a, à travers un dialogue vertical, échangé directement avec la population sur cette question brulante.
A Ngondi, à Masamuna, à 27 kilomètres de Masimanimba, Muzito a parlé avec des éleveurs. Témoignage de Luboto: «Les pasteurs trouvés à Ngondi nous ont dit qu’ils sont au nombre de 10 mais les autres sont déjà rentrés après avoir vendu leurs bêtes. Ils ont dit qu’ils viennent de l’Est, principalement de Uvira au Sud-Kivu, attirés par la forte demande. Ils ont dit qu’ils ont traversé Kalemie, les Kasaï via Mbuji-Mayi, avant d’atteindre Kwilu et Kwango».
De son côté, la population a fait part de l’insécurité causée par ces bêtes et dit surtout redouter la réédition du phénomène Mbororo, ces éleveurs venus des environs du lac Tchad dont ils fuyaient l’assèchement, installés depuis à l’extrême nord-est de la République Démocratique du Congo et en conflit permanent avec les pasteurs et agriculteurs Hema et Lendu pour le contrôle des pâturages. Leur inquiétude est plus grande quand ils évoquent les nouvelles véhiculées dans les réseaux sociaux, selon lesquelles les propriétaires des vaches déportées seraient tantôt des envahisseurs, tantôt des militaires rwandais qui auraient reçu mission de creuser des caches d’armes. Le comportement des chefs traditionnels en rajoute à la méfiance. «Certains chefs traditionnels bradent les espaces à vil prix ou contre quelques têtes des vaches», s’indigne la population, redoutant d’éventuels conflits fonciers.
De retour à Kinshasa, Muzito est allé rendre compte de sa mission au Premier ministre Bruno Tshibala. La rencontre entre les deux personnalités a eu lieu ce lundi 12 février à la Primature. Selon certaines indiscrétions, le Premier ministre honoraire a plaidé pour la sécurisation des autochtones dont les terres sont cédées à vil prix à ces éleveurs alors que leurs champs détruits par les troupeaux de plus en plus envahissants. L’angoisse de l’ancien ministre du Budget se fonde sur les faits qu’une vache de 700 kilos, par exemple, consomme entre 60 et 120 litres d’eau par jour et peut manger jusqu’à 70 kilos d’herbes par jour. Rien que pour les 300 têtes identifiées à Ngondi, ce sont environ 21 tonnes d’herbes et entre 18.000 et 36.000 litres d’eau engloutis en l’espace de 24 heures. Inutile de faire allusion aux quantités des bouses déféquées quotidiennement. Ces chiffres ajoutés aux 500 bêtes signalées vers Bukangalonzo et environ 400 vers Popokabaka font craindre un désastre écologique.
Le plaidoyer a été également dédié à la mise en œuvre d’un plan de sécurisation des pasteurs avec le cash généré par la vente et d’un plan visant la règlementation d’un séjour temporaire de ces commerçants. L’élu de Kikwit a surtout demandé au Premier ministre de descendre sur terrain pour des enquêtes appropriées et de suspendre ce commerce pour apaiser la population en colère. Muzito s’est rendu chez Tshibala auréolé des résultats du sondage Les Points réalisé les 8 et 9 février dans les principales agglomérations du Kwango et Kwilu: 64 pourcent des sondés lui accordent la confiance et lui confient la charge de plaider leur cause auprès des instances nationales.

AKM

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page