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RDC : Ça brûle au Sénat

«Nous demandons à Son Excellence Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat, d’arrêter cette dérive dictatoriale, susceptible de plonger le pays dans l’instabilité institutionnelle et sociale…», réclament un groupe de sénateurs du FCC opposés à la démarche de déstabilisation du Sénat

Les choses se passent très vite à la Chambre haute du Parlement RD-congolais, comme un éclair file quand il pleut. A la manœuvre, les pétitions visant les membres du bureau Thambwe Mwamba, président du Sénat. En l’espace de 24 heures, deux plénières contradictoires ont été convoquées.

La première par le président du Sénat, Alexis Thambwe Mwamba, mercredi 3 février lors de l’ouverture de la session extraordinaire devant examiner et voter le Projet de loi autorisant la ratification par la RD-Congo de l’Accord portant création de la Zone de libre-échange continentale africaine -ZLECAF. Session qu’il a clôturée le même jour sur fond de tension après les dépôts de pétitions de déchéance.

Les signataires des pétitions ont crié à la cacophonie accusant leur président de prendre une fuite en avant au motif qu’il ne pouvait pas présider ladite plénière car étant visé par une pétition. Ils ont réclamé une nouvelle plénière qui a été présidée jeudi 4 février par le Secrétaire général du Sénat, Gilbert Kikudi. Avec les 64 sénateurs présents sur 108 que compte le Sénat, ce dernier a mis en place un bureau d’âge composé de Léon Mamboléo, Victorine Lwesse et Reagan Ilanga Bakonga, respectivement doyen d’âge et deux benjamins.

Immédiatement, ce bureau d’âge a convoqué à son tour une plénière ce vendredi 5 février pour statuer sur ces deux pétitions. Dans cet imbroglio, le rapporteur adjoint du Sénat, Marie-Josée Kamitatu, également visé par la pétition, a démissionné de ses fonctions juste après l’installation dudit bureau.

Quelques sénateurs/FCC dénoncent

La réplique de certains sénateurs du Front commun pour le Congo -FCC- qui n’ont pas adhéré à l’Union sacrée face au climat tendu vu au Sénat en rapport les pétitions, est tranchante: «le Sénat de la RD-Congo traverse un moment critique de son existence entant que IIIème institution de la République, et haute instance de la Représentation du peuple congolais, en général et singulièrement de nos provinces», lit-on dans leur déclaration faite ce jeudi 4 février.

Ils accusent le Président de la République d’agir de violation en violation de la Constitution. Et ce, depuis ses prises des fonctions. «Déjà à la veille de l’élection des sénateurs en mars 2019, il y eut des tentatives d’abord pour empêcher la tenue des scrutins et puis pour bloquer l’installation de la Chambre haute», évoquent-on, dénonçant: «avec la survenue de la pandémie de la Covid-19, ayant nécessité la proclamation de l’état d’urgence sanitaire, les actes de convocation et de prorogation de l’état d’urgence sanitaire furent pris en criante violation des dispositions de la Constitution et des Règlements intérieurs des deux Chambres et du Congrès».

Puis: «la voie de la violation systématique de la Constitution ayant étant ainsi balisée, des juges de la Cour constitutionnelle furent nommés ou relevés de leurs fonctions en violation flagrante des dispositions tant de la Constitution que des lois organiques régissant ladite Cour et le Conseil supérieur de la magistrature, ainsi que des règlements intérieurs de ces juridictions. Les bureaux des Chambres s’abstinrent de cautionner l’illégalité et ne participèrent point à la cérémonie de prestation de serment. Ce qui passa pour un crime de lèse-majesté».

Puis encore: «depuis ce mercredi 03 février 2021, la situation est à son comble. Alors que la session extraordinaire, convoquée sur demande de Son Excellence Monsieur le Président de la République, pour examiner le Projet de loi de ratification du traité portant création de la Zone de libre échange continentale africaine -ZLECAF-, venait d’être clôturée et que les sénateurs étaient censés reprendre leurs vacances, le Secrétaire général a été enlevé et contraint de convoquer une plénière. Les commanditaires de cette convocation irrégulière et illégale ont pris le prétexte de l’examen de pétitions initiées contre six membres du bureau, lesquelles ne pouvaient être examinées au cours d’une session extraordinaire, dont l’ordre du jour est préalablement déterminé conformément aux dispositions pertinentes de la Constitution et du Règlement intérieur du Sénat. Et pourtant, le septième membre du bureau a aussi fait l’objet d’une pétition à sa charge, mais elle ne semble guère préoccuper les maîtres d’œuvre de la déstabilisation de la Chambre haute».

Selon eux, face à l’accumulation des artifices procéduraux et à la conjugaison des violations de la Constitution, des lois et règlements de la République, il apparaît clairement que la convocation par le Secrétaire général du Sénat des sénateurs à prendre part à une plénière jeudi 4 février 2021, en pleines vacances parlementaires, est le coup de grâce asséné aux institutions de la République, après la mise au pas de la Cour constitutionnelle, le renversement du bureau de l’Assemblée nationale et la déchéance du Premier ministre.

«C’est pourquoi, nous sénateurs membres du FCC, indignés par le recul des pratiques démocratiques dans notre pays, révoltés par les coups de force systématiques contre les institutions de la République, soucieux de prévenir le risque de recours à la prise en charge des populations de nos provinces respectives par elles-mêmes conformément aux dispositions de l’article 64 de la Constitution, dénonçons la convocation illégale d’une plénière par le Secrétaire général du Sénat, l’implantation sans masque d’une dictature monolithique, l’exacerbation des tensions intercommunautaires, et la réédition des conditions qui conduisirent à l’instabilité politique dans les années 1960 et 1965».

Et de conclure: «en conséquence, nous demandons à Son Excellence Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat, d’arrêter cette dérive dictatoriale, susceptible de plonger le pays dans l’instabilité institutionnelle et sociale, et prenons à témoin l’opinion tant nationale qu’internationale, ainsi que les instances interparlementaires internationales, celles de l’Union africaine, de la CEEAC et de la SADC, sur la nécessité de ne pas cautionner la caporalisation du Parlement à la veille de la prise en main de la direction des instances de l’Union africaine et de la SADC par notre pays». A considérer la déchéance du bureau Mabunda par pétition et du Premier ministre par motion de censure, d’aucuns pensent que le sort du bureau Thambwe Mwamba sera scellé au cours de la plénière de ce vendredi convoquée par le bureau d’âge et dans laquelle les membres du bureau visés par une pétition sont invités à présenter leurs moyens de défense.

Selon le sénateur Vunabandi, la pétition n’est pas une chasse contre les sénateurs FCC. Le bureau a commis des fautes lourdes. «Lorsque Thambwe Mwamba initie la réhabilitation des bureaux sans informer les sénateurs et même loge l’argent du Sénat chez lui alors que la Chambre haute du Parlement  est parmi les institutions sécurisées, c’est une tentative de détournement. La pétition ne vise autre chose que doter le bureau des animateurs crédibles», a-t-il dit étant signataire de la pétition.

Octave MUKENDI 

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