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Nord-Kivu entre intégrité et découpage

Une organisation non gouvernementale, «Agence francophone des Ecolos», a, depuis quelques mois, initié une pétition pour solliciter le découpage territorial de la province du Nord-Kivu. Elle trouve, dans sa démarche, l’opportunité de mettre finalement fin aux différents problèmes ayant contribué au déchirement de la province. Samedi 21 juillet, Innocent Segiyobe, l’un des membres de cette structure, a affirmé que cette pétition a déjà récolté 114.303 signatures favorables au découpage de cette province. A l’opposé, la Société civile du Nord-Kivu s’oppose farouchement à cette démarche et a initié une contre-pétition allant dans le sens de protéger l’intégrité territoriale de la province.
 
Dans les prochains jours, la province du Nord-Kivu pourrait subir un découpage de son territoire. C’est le vœu de certains fils et filles de cette province qui se sont exprimés via une pétition initiée par l’Agence francophone des Ecolos. A ce jour, 114.303 personnes sont favorables à cette démarche. Un pari presque gagné selon Innocent Segiyobe, membre de cette agence francophone, qui s’est expliqué en ces termes: «La procédure en matière de pétition prévoit que lorsqu’il y a une initiative du genre qui voudrait procéder à un nouveau découpage territorial, il doit y avoir au moins 100.000 personnes qui puissent s’exprimer et qui avalisent la démarche. Nous avons atteint 114.303 personnes aujourd’hui». Et de poursuivre: «nous sommes heureux d’informer l’opinion que, finalement, les problèmes du Kivu, les problèmes qui ont tant duré, le déchirement provincial, les conflits interethniques, les groupes armés qui ne finissent pas, vont trouver des solutions».
Samedi 21 juillet sur les antennes de la Radio Okapi, Innocent Segiyobe a indiqué que son organisation est satisfaite d’avoir franchi la première étape de l’objectif. «Après la récolte des signatures favorables, la prochaine étape de cette démarche sera politique et administrative. Les initiateurs de la pétition vont saisir le Parlement», a-t-il précisé.
La Société civile opposée au découpage de la province 
La démarche de l’Agence francophone des Ecolos ne met pas d’accord la Société civile du Nord-Kivu qui, elle aussi, a initié une pétition contre ce projet de découpage. Selon Etienne Kambale, team leader adjoint de la coordination provinciale de la société civile forces vives du Nord-Kivu et membre de la thématique gouvernance, son mouvement social reste serein malgré les signatures récoltées par l’Agence francophone des Ecolos.
Il a renseigné que la société civile est en train de rassembler les plis venus des territoires du Nord-Kivu et promet de rendre publics ses résultats très prochainement. Selon lui, les occupants de la province du Nord-Kivu, en majeure partie, sont opposés à un éventuel découpage de la province.
«Cette position n’arrange pas la population du Nord-Kivu. S’il y a des déficits en ce qui concerne la gouvernance, ce n’est pas un motif suffisant pour diviser la province. Cette logique des Ecolos n’arrange pas les intérêts de la RD-Congo. Il faut que tous les enfants de la RD-Congo voient en cette initiative un danger. C’est comme ça que les rebellions ont toujours commencé dans l’Est. C’est une approche dangereuse et elle n’est pas loin d’être appuyée par certains acteurs politiques», alerte Etienne Kambale.
Une autre voix s’opposant à la démarche de l’ONG «Agence francophone des Ecolos» est celle du sénateur Jacques Djoli. Sur la radio onusienne, l’opposant a dit voir dans cette démarche le cri de désespoir d’une communauté face à une situation d’absence de l’autorité de l’Etat.
«C’est le reflet de l’absence de l’autorité de l’Etat dans la province. Nous assistons depuis pratiquement plus de dix ans à la détérioration de la sécurité dans cette partie du territoire national et la réponse de l’Etat, de ses alliés, y compris de la MONUSCO semblent inadéquates. Voilà pourquoi on en arrive à cette situation que moi j’appelle de cri de désespoir», a affirmé l’opposant. Tout en reconnaissant aux initiateurs la légalité de leur démarche en se basant sur la Constitution, Jacques Djoli trouve cependant «infondée», l’argument avancé par l’initiatrice de cette motion.
«La raison avancée, la mauvaise cohabitation, est infondée. Parce que ce n’est pas à eux de mener cette démarche. C’est à l’Etat qu’il appartient d’assurer la cohabitation pacifique, l’intégration, l’harmonie au sein des groupes divers qui occupent un Etat. Il y a des Etats comme la Suisse où on trouve des gens qui parlent des langues italiennes, les francophones, les germanophones, et ça ne pose jamais de problème», a argumenté le sénateur qui a déconseillé cette démarche, estimant qu’elle est dangereuse pour un Etat encore fragile comme la RD-Congo.
Pour ceux qui ne savent pas, la province du Nord-Kivu est née des cendres de l’ancienne grande province du Kivu qui a donné naissance à trois provinces : le Nord-Kivu, le Sud-Kivu et la Maniema. L’ONG «Agence Francophone des Ecolos» plaide pour le découpage territorial du Nord-Kivu, qu’elle présente comme remède aux conflits intercommunautaires récurrents enregistrés ces dernières années dans la province.
Olitho KAHUNGU

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