Après la lettre de prise d’acte de la démission de Richard Muyej par le président de la République Félix Tshisekedi datée du 30 janvier 2023, signée de la main du Directeur de cabinet Guylain Nyembo et ouvrant la voie à l’organisation d’une gouvernorale au Lualaba mais gardée secrète depuis, AfricaNews a pu se procurer un autre courrier caché sur le même dossier. Il s’agit d’une correspondance portant la signature du Conseiller spécial du Chef de l’Etat en matière de sécurité, Jean-Claude Bukasa, concernant l’organisation de l’élection du gouverneur de la province du Lualaba, datée du 20 mars 2023, adressée au vice-premier ministre en charge de l’Intérieur et sécurité, qui l’a reçue le 21 mars en même temps que le cabinet du Président, les accusés de réception faisant foi. Ce n’est pas un hasard si cette missive est dévoilée au grand jour, exactement quatre jours après la publication, dans ces mêmes colonnes, d’un précédent courrier du Directeur de cabinet du président de la République prenant acte de la démission de Richard Muyej de ses fonctions de gouverneur et ordonnant l’organisation de l’élection de son successeur.
«Excellence Monsieur le Vice-Premier Ministre, De la Correspondance du Directeur de Cabinet du Président de la République dont copie nous a été réservée, il me revient que la Haute Hiérarchie a pris acte de la démission de Monsieur Richard Muyej, Gouverneur de la Province du Lualaba. Devant la nécessité de pourvoir à la vacance ainsi créée et pour éviter les critiques les plus acerbes de l’opposition, je sollicite votre implication personnelle pour que les mécanismes prévus par les dispositions pertinentes de la loi n° 06/006 du 09 mars 2006; telle que modifiée et complétée à ce jour, portant organisation des élections présidentielles, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales soient actionnées en urgence», a écrit le Conseiller spécial au VPM en charge de l’Intérieur.
Restée lettre morte depuis le 21 mars, date de sa réception par la vice-primature chargée de l’Intérieur, cette correspondance du Spécial Bukasa est en train de subir, depuis trois mois donc, le même traitement et le même sort que la lettre du 30 janvier 2023 du Dircab Guylain Nyembo, jamais exécutée tant par le ministère de l’Intérieur que par le Bureau de l’Assemblée provinciale du Lualaba.
Ordre bafoué du Président!
Dans leurs agissements respectifs, le ministère de l’Intérieur et l’Assemblée provinciale sont donc en rébellion et en train de bafouer un ordre précis du président de la République, Chef de l’Etat, laissant ainsi l’opinion spéculer sur les réelles motivations de leur étrange réflexe. «Ils étalent au grand jour la manière dont les dossiers publics sont gérés -cela fait aujourd’hui peu de doute- par certains animateurs de l’appareil de l’Etat», a commenté en privé un membre du Bureau de l’Assemblée nationale. Le gouverneur du Lualaba, Richard Muyej, a déposé, mardi 10 janvier 2023, sa démission adressée au président de la République auprès du vice-Premier de l’Intérieur.
«Je confirme avoir déposé ma démission. Et pour ceux qui suivent de près mon dossier, ils se rappelleront qu’il y a deux ans exactement, 10 janvier 2021, que j’ai été évacué en Afrique du Sud pour raisons de santé. Ça fait deux ans que je suis loin de ma province, deux ans que ma province tâtonne, deux ans que ma province peine à soutenir l’élan de relance, j’estime qu’il était temps que j’arrête», a-t-il expliqué dans les médias.
Muyej a affirmé avoir pris cette décision pour donner la chance à la province du Lualaba de retrouver sa légitimité et de se développer. «Il était temps que j’arrête et que je donne la chance à la gouvernance de retrouver la légitimité, à travers des élections libres et transparentes pour qu’enfin les bases de relance soient consolidées. Je ne voudrais pas être l’obstacle au développement d’une province que j’aime beaucoup. Donc, c’est en toute liberté que j’ai déposé ma démission», a-t-il ajouté. C’est depuis le 30 janvier que le président de la République a pris acte de cette démission mais ni cette décision, ni ses instructions contenues dans la lettre de son Directeur de Cabinet, et encore moins le courrier de son Conseiller spécial portant sur l’organisation de l’élection d’un nouveau gouverneur n’ont été publiés au grand jour et exécutés par les principaux destinataires, laissant se perpétuer la vacance et l’illégalité.