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Polémique autour de la loi organique sur la CNSA, un mémo adressé aux sénateurs

Adopté à l’Assemblée nationale, le projet de loi organique portant création et organisation du Conseil national de suivi de l’Accord et du processus électoral -CNSA- est en voie d’être examiné au Sénat. En attendant son examen par la Chambre haute du Parlement, des voix se sont levées pour dénoncer certaines de ses dispositions qui violent des prescrits pertinents de l’Accord politique du 31 décembre 2016 et de l’Arrangement particulier d’avril 2017. Un memo transmis à Léon Kengo wa Dondo, président du Sénat, auquel AfricaNews, dans ses investigations, a eu accès, tire la sonnette d’alarme pour voler au secours du CNSA, institué pour jouer le rôle de sentinelle du processus électoral. Dans ce memo, ces prescrits en contradiction avec l’Accord et l’Arrangement particulier sont relevés en plus des propositions de correction pour que ce projet de «loi organique sous examen reflète bien les prescrits de l’Accord du 31 décembre». Ci-après, l’intégralité de ce memo.

Memo à l’Honorable Président du Sénat

En main le projet de la loi organique portant institution, organisation et fonctionnement du Conseil national de suivi de l’Accord et du processus électoral, CNSA, tel qu’adopté par l’Assemblée nationale et transmis au Sénat pour adoption en texte identique.
Ce texte ne parait pas traduire exactement l’esprit et la lettre de l’Accord politique du 31 décembre 2016 tant dans son exposé des motifs que dans quelques dispositions.
Vous trouverez ci-dessous le relevé des éléments sur lesquels nous attirons l’attention de l’Honorable Président ainsi que les corrections proposées pour que cette loi organique sous examen reflète bien les prescrits de l’Accord pré rappelé.

  1. De l’exposé des motifs

On note à ce niveau que le texte soumis au Sénat est muet sur les prescrits de l’Accord politique du 31 décembre 2016 qui disposent que le CNSA soit mis en place et fonctionne en attendant la promulgation de la loi organique sur base des dispositions dudit Accord et du règlement intérieur provisoire (Cfr Accord, chapitre VI.1). Pourtant, ces dispositions ont bien été mises en œuvre par les actions conjointes du Chef de l’Etat, du Président de l’Assemblée nationale et du Président du Sénat. Il s’en suit la réalité de l’existence du CNSA depuis le 22 juillet 2017.  La conséquence juridiquement logique et juste est que la loi organique à venir, dans certaines de ses dispositions, doit rétroagir en entérinement de ce qui s’est fait avant son entrée en vigueur, lequel ne peut qu’à la date de sa promulgation vu l’important retard que connait cette législation voulue urgente par l’Accord. Ainsi, serait-il pertinent de mentionner dans la partie finale de l’exposé des motifs que:”Cet Accord prévoit: «En attendant l’adoption en procédure d’urgence de la loi organique, cette structure est mise sur pied et fonctionne sur base du présent Accord».”Ainsi, le CNSA a été installé le 22 juillet 2017 et fonctionne sur base des dispositions de l’Accord et du Règlement intérieur provisoire;
La présente loi organique répond à l’exigence de l’Accord de conformer l’institution, l’organisation et à la Constitution”. D’autre part, l’annoncé de la dissolution du CNSA à l’installation de la nouvelle Assemblée nationale n’est pas opportune à l’exposé des motifs en ce qu’elle n’est pas un principe retenu par l’Accord pour cette institution de crise gardienne du consensus politique durant toute la période préélectorale et électorale surtout que ces périodes couvrent la totalité du cycle électoral. De toutes les façons, le CNSA ne tient nullement lieu de l’Assemblée nationale et encore moins d’un Parlement. Cette dernière mention devrait simplement être élaguée.

  1. Des articles

 De la durée du CNSA
La durée du CNSA renvoie à la mission et aux attributions de ce dernier telles que contenues dans l’Accord politique du 31 décembre 2016 à son chapitre VI.2.3 et lesquelles sont d’ailleurs reprises à l’article 7 de la présente loi. Il convient de garder à l’esprit que le processus électoral considéré par l’Accord intègre les élections urbaines, municipales et locales, qui sont d’ailleurs les plus en souffrance et dont il ne faudrait pas laisser la liberté de les renvoyer aux calendes grecques. L’installation de la nouvelle Assemblée nationale ne marque pas la fin du processus électoral.
A la place de l’installation de la nouvelle Assemblée nationale telle que mentionnée dans l’article 9 de la loi sous examen, il est plus correct de retenir: ‘’l’installation de derniers organes issus du cycle électoral en cours’’.
 De la désignation des membres
Les dispositions de l’article 13 de l’Arrangement particulier relatif à la mise en œuvre de l’Accord politique du 31 décembre 2016 sont suffisamment précises sur cette question. Il n’y dès lors aucune utilité à grever celles-ci d’un entérinement qui heurterait l’Accord.
Il y a lieu de reprendre simplement le libellé de cet article 13 en lieu et place de l’alinéa 1er de l’article 11 de la loi organique sous examen, appelé à être élagué. L’article 13 de l’Arrangement particulier précise la procédure et les modalités de désignation des membres du CNSA en ces termes: «(…) En attendant l’entrée en fonction du Président du CNSA, les listes des membres désignés (par leurs composantes respectives) sont transmises au Président de la République. Dans le délai de 15 jours, à compter de la date du dépôt des listes des membres désignés, le Président de la République convoque les membres du CNSA afin notamment de :
– valider les mandats ;
– discuter de la désignation par consensus du Président du CNSA ;
– constituer le bureau définitif du CNSA».
A ce jour, toutes ces formalités relatives à la désignation des membres du CNSA ont déjà été accomplies.
 Du droit d’option
L’article 14 qui prévoit le droit d’option du membre du CNSA en situation d’incompatibilité donne un délai de huit jours à dater de la promulgation de la loi en chantier pour ce faire.
Cette disposition n’a pas une formulation heureuse dès lors qu’il n’est pas précisé que la loi organique considère comme aboutie la mise en place du CNSA intervenue le 22 juillet 2017. Pour les personnes qui pourraient avoir cette qualité ultérieurement à la promulgation de la présente loi organique, ce point de départ est simplement inapplicable dès lors que la procédure prévue à l’alinéa 2 de l’article 9 prévoyant certaines formalités chronophages avant l’effectivité du mandat, outre que ces prochaines désignations pourraient intervenir bien au-delà des huit jours de la promulgation de la loi organique.
Cet article 14 devrait être reformulé dans le sens ci-dessous :
‘’Le Membre actuel du CNSA en situation d’incompatibilité est tenu, dans les huit jours qui suivent la promulgation de la présente loi, de renoncer expressément à ses fonction, causes d’incompatibilité’’.
 Des frais d’installation et d’indemnité de sortie
L’article 16 relatif aux avantages financiers des membres du CNSA a omis de reprendre ces avantages, pourtant reconnus aux membres de toutes les institutions du pays, et qui participent à l’honorabilité et à la dignité de ces charges publiques. Il n’y a donc aucune raison qu’ils n’en bénéficient pas ; sauf à décider d’instaurer une discrimination en violation intentionnelle de l’article 13 de la Constitution. Il convient de corriger cette omission en ajoutant la phrase ci-après: «Ils ont droit aux frais d’installation et à une indemnité de sortie équitable».
De la fin du mandat du membre du CNSA
L’article 15 de la loi sous examen reprend en soin point 7 ‘’le retrait de confiance par la composante délégante conformément au Règlement intérieur’’ comme cause de fin de mandat du membre du CNSA. Outre que l’appendice conformément au Règlement intérieur paraisse incongru, cette disposition repose une institution nationale sur le principe d’un mandat impératif quasi incompatible à la mission de ne défendre qu’un texte consensuel préétabli, l’Accord politique du 31 décembre 2016. Par ailleurs, la volatilité endémique des Regroupements politiques risquerait de rendre très instable le CNSA s’il n’est pas à l’abri des tourbillons dans ces ensembles.
Il est plus convenable d’élaguer le point 7.
 Du Président du CNSA
L’article 24 de la loi organique en discussion se veut en conformité avec le point VI.2.2 de l’Accord mais ne reprend pas un élément de précision important y mentionné qu’il sied de l’ajouter.
On écrira plus correctement cette disposition comme suite:
‘’Conformément à l’Accord en son point VI.2.2, le CNSA est présidé par le Président du Conseil des sages du Rassemblement’’. Cette précision a également l’avantage de stabiliser l’institution CNSA.
 
 De la dissolution
Conformément à ce que nous avons proposé à l’exposé des motifs «in fine» et à ce qui est prévu pour la durée du CNSA, l’article 39 devra coïncider la dissolution du CNSA à l’installation effective de derniers organes issus de dernières élections urbaines, municipales et locales du cycle en cours. La dissolution du CNSA sera de plein droit à la fin de sa mission caractérisée par l’aboutissement du processus électoral.
 De la disposition finale
Considérant la préexistence du CNSA par rapport à la loi organique suivant les prescrits de l’Accord, il est essentiel que cette loi porte entérinement de ce qui a été fait le plus officiellement.
On écrira ainsi à l’article 40:
‘’La présente loi organique porte entérinement de la mise en place du CNSA le 22 juillet 2017, le cas échéant, ses dispositions idoines rétroagissent à cette date’’.
‘’Elle entre en vigueur à la date de sa promulgation’’.
L’application immédiate de cette loi organique est déjà confortée par l’article 9 qui prend cet élément comme point de départ du droit d’option. En plus, il n’y a pas d’utilité à différer l’entrée en vigueur d’une loi adoptée en procédure d’urgence.

  1. Conclusions

Le but de notre démarche est de conformer la loi organique aux prescrits de l’Accord et à l’Arrangement particulier. En cas de problème de compréhension ou d’interprétation desdits prescrits, le CNSA qui a compétence d’interpréter les dispositions de l’Accord conformément au point VI.2.3 se tient à la disposition de deux chambres du Parlement pour toute clarification nécessaire en vue de protéger l’équilibre politique de cet Accord pour toutes les parties et concilier leurs points de vue.
La présente loi a la valeur d’une régularisation.
Franche collaboration.
Fait à Kinshasa, le 1er décembre 2017

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