Interview

Gloria Sengha : "La femme est égale à l'homme selon ses compétences"

Gloria Sengha Panda Shala. Un nom connu du public grâce à l’engagement et au courage dont son porteur fait preuve. Activiste des droits de l’homme et de la démocratie, fondatrice du mouvement Vici, Gloria Sengha est de la catégorie de femmes qui refusent tout favoritisme au nom de la parité, estimant que chacun doit mériter ce qui lui revient selon ses compétences. Visiblement séduite par les signaux positifs émis par le Président Félix Tshisekedi dès l’entame de son mandat quinquennal, Sengha a dit nourrir des ambitions politiques en vue de gérer «honorifiquement» la chose publique un jour. «Que cela ne choque pas si demain Gloria devenait députée ou ministre», prévient cet ancien membre de la Lucha à la faveur d’un entretien avec AfricaNews. Lisez.


En tant qu’activiste des droits de l’homme et de la démocratie, vous sentez-vous satisfaite de l’alternance au sommet de l’Etat?

Je suis plutôt déçue. Nous ne nous sommes pas battus contre un individu mais contre tout un système qui s’est enraciné dans le temps. Sous la direction des Kabila, nous avons vécu deux décennies de prédation, de corruption, d’impunité. Aujourd’hui, Kabila est parti sans bouger. Il continue à tirer des ficelles. On aurait bien voulu faire semblant si Kabila aussi faisait semblant de cacher son ombre. Il laisse manifestement voir qu’il est encore là et qu’il continue de gérer la République.

Puisque, selon vous, Kabila n’est vraiment pas parti, votre lutte va-t-elle continuer?

Effectivement. La lutte n’est pas menée contre un individu, plutôt contre un système établi dans
plusieurs domaines de la vie: justice, enseignement, etc. Le système s’est formé  autour de toutes ces histoires qui caractérisent notre vie en tant que citoyen RD-congolais. La lutte va continuer jusqu’à l’éradication de tout le système pour permettre à la République d’avancer.

Le début du règne de Tshisekedi peut-il inspirer confiance pour un Etat de droit selon votre combat?

Je ne sais pas juger trop tôt. Le point positif depuis sa prise des fonctions est la libération de l’espace politique et des prisonniers politiques et d’opinion. Aujourd’hui, les manifestations sont libres et encadrées par la police. Ce sont des signaux positifs, mais nous voulons voir plus.

Que peut-être l’apport de la femme dans la lutte pour l’instauration d’un véritable Etat de droit en RD-Congo?

La femme RD-congolaise a intérêt à s’investir dans ce processus d’instauration d’un Etat de droit. Là où les hommes ont échoué, les femmes peuvent faire mieux. C’est le cas du Libéria, de la Corée du Sud. Il est plus que temps pour les femmes de s’inviter soit dans la politique soit dans l’activisme. L’avenir du Congo n’est pas l’affaire d’une catégorie de personnes. C’est l’affaire de tous. Femmes et hommes, nous devons nous mettre ensemble pour l’avancement de la République.

Croyez-vous en la parité?

Je crois en la parité mais cela ne doit pas être une raison pour le favoritisme. La parité ne doit pas apparaitre comme une mesure discriminatoire. On est égale à l’homme selon nos compétences. Chacun doit mériter ce qui lui revient.

Vous avez récemment créé votre propre mouvement d’activistes. Quelle touche nouvelle apportez-vous dans ce domaine?

Nous sommes toujours dans la logique de l’activisme, mais nous avons apporté des méthodes nouvelles comme l’activisme de proximité. Il consiste à aller vers les citoyens, les conscientiser et leur faire savoir qu’ils sont les vrais et véritables détenteurs du pouvoir, et qu’ils sont à même de décider de leur sort. Dans les jours à venir, nous allons relancer les activités comme dans le passé.

Certaines langues estiment que vous vous servez de l’activisme pour vous frayer un chemin vers la politique. Est-ce vrai?

Gloria Sengha ne sera pas activiste à vie. Je l’ai toujours dit. Je fais de l’activisme pour qu’un jour je gère la chose publique. Mais, je gérerai de manière très honorifique. Je ne gérerai pas parce qu’on m’a fait une faveur mais parce que je l’ai mérité avec toutes mes compétences et mon courage. L’activisme n’est pas une activité viagère pour moi. Je finirai par basculer en politique. Que cela ne choque pas si demain Gloria devenait députée ou ministre. Si c’était seulement pour l’argent, on serait débauché par la kabilie depuis longtemps.

Avez-vous eu des sollicitations?

Je ne sais pas vous le dire. Nous avons un idéal que nous poursuivons et défendons.

L’on peut dire que c’est à cause de votre refus que vous avez souvent été arrêtée?

Non. Ce sont plutôt mon engagement et mon courage qui dérangeaient vraiment le régime.

Propos recueillis par Laurent OMBA

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