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Au Katanga, TFM se comporte en territoire conquis

Les installations de TFM au Katanga
Les installations de TFM au Katanga
Quand une enquête sur la problématique de la fourniture du courant électrique au Katanga révèle le côté barbare et incivique du groupe minier américain, réfractaire aux restrictions imposées à tous les minings par la RD-Congolaise SNEL et au paiement des factures de consommation du Zambien Zesco: USD 18 millions d’arriérés! L’ampleur des dégâts causés aux concurrents, à la population et au Trésor public révolte!
C’est révoltant, ce qui se passe dans le domaine de consommation électrique au Katanga. Alors que des mesures d’encadrement et de restriction ont été prises pour résoudre tant soi peu l’épineux problème du déficit énergétique frappe le Katanga, ses industries minières et sa population, tous contraints journellement aux délestages intempestifs, un opérateur minier a choisi de se comporter en caïd. Son nom: Tenke Fungurume Mining -TFM. Le groupe américain serait-il devenu un Etat dans un Etat au Katanga?
Possible, affirment les observateurs, au regard de son attitude face aux rappels à l’ordre de la SNEL et des suites que ses services financiers accordent aux factures de consommation lui transmises par l’opérateur RD-congolais de l’électricité. Des investigations auprès de la SNEL, de la Chambre des Mines, des autorités de la province du Katanga et des miniers ont permis de cerner le problème dans sa globalité et découvrir le côté incivique de TFM, qui ose dépasser le taux de consommation imposé à tous, refuse de payer les factures de consommation du courant électrique importée de Zambie et, pire, d’accepter les limiteurs de la SNEL dans ses installations. Scandaleux.
Le gouvernement RD-congolais a fixé aux entreprises minières des objectifs de production précis allant dans la sens de l’augmentation de la production afin de lui permettre de récolter pour le compte du Trésor des recettes qui vont lui permettre de réaliser son plan de développement du pays, d’autant plus que les mines représentent à ce jour le premier secteur qui contribue le plus au Budget de l’Etat devant les télécommunications soit le 1/3 du PIB. De leur côté, les minings se sont fixés des objectifs chiffrés en termes de production de cuivre, du cobalt, d’or, etc.
Pour réaliser cette augmentation de la production et profiter de l’embellie des cours sur le marché international, des apports en capitaux, bref de nouveaux investissements sont nécessaires ainsi qu’une énergie électrique suffisante et de bonne qualité. Mais il y a un gros souci: la province du Katanga qui héberge la plupart des sociétés minières est aujourd’hui confrontée à un problème sérieux d’électricité, déficitaire et insuffisante pour satisfaire toute la demande en énergie électrique. Pour contourner cet écueil, une synergie est mise en place. Des stratagèmes sont imaginés.
La Société nationale d’électricité -SNEL- dont on connaît les insuffisances et l’incapacité à fournir un produit de qualité à ses abonnés se démène tout de même pour trouver les 572 mégawatts dont a besoin la grosse industrie minière du Katanga, ainsi que les 36 mégawatts pour la petite industrie et les petites mines et les 116 mégawatts pour la population de cette même province.
Le gouvernement RD-congolais n’est pas en reste. Pour aider la SNEL à améliorer sa trésorerie afin de lui permettre de faire des investissements en vue de l’augmentation de sa production d’énergie, l’Exécutif s’empresse de procéder à des révisions tarifaires via le ministère de l’Economie. Malgré le tollé des protestations que cette augmentation des prix a soulevé dans le chef de grands abonnés de la SNEL, des arrangements ont pu être trouvés par rapport à cette nouvelle tarification. Et quelques clients de bonne volonté et consciencieux s’acquittent de leurs allégrement de leurs obligations.
La SNEL a les moyens d’imaginer des solutions palliatives. Décidée d’aider les industries minières du Katanga à combler leur déficit en énergie électrique, elle lève l’option d’importer du Zambien ZESCO 100 mégawatts facturés à USD 0,7 -7 cents- le kilowatt/heure avec une augmentation de 50 % sur le tarif import en cas de dépassement de consommation. Tous les minings se soumettent sauf un, Tenke Fungurume Mining!
Le pavé du minier américain
Alors qu’elle figure parmi les plus grosses entreprises minières consommatrices de l’énergie électrique, TFM sabote l’opération. Elle s’illustre par un comportement on ne peut plus incompréhensible et méprisable. Comme d’autres entreprises minières du Katanga, le groupe américain a signé un contrat aux termes duquel il s’engageait à contribuer au financement de l’amélioration de la production énergétique de la SNEL. En retour, l’opérateur RD-congolais d’électricité s’est aussi engagé à lui fournir une certaine quantité d’énergie par rapport à ses besoins qui devaient aller crescendo.
La souscription de TFM était de l’ordre de 105 mégawatts au maximum et 95 mégawatts au minimum, apprend-on. Mais la SNEL, en grande difficulté, ne peut fournir à TFM que 85 mégawatts. Elle évoque pour cela l’argument du cas de force majeure et demande à TFM de comprendre en attendant la solution définitive, d’autant plus qu’il y a les 100 mégawatts importés de la Zambie.
Mais lorsqu’arrive la facture de Zesco de la Zambie pour les 100 mégawatts importés et que la SNEL exige paiement par tous les utilisateurs, toutes les entreprises minières payent, à l’exception de TFM qui évoque son contrat avec la SNEL comme si elle était la seule entreprise à avoir signé un contrat avec le fournisseur national d’énergie électrique. Effarant.
Plus grave encore, la SNEL, par souci d’ordre et d’équité, décide de placer chez ses gros clients des limiteurs de puissances. Tout le monde collabore, hormis, une fois encore, TFM avec cette conséquence que ce client capricieux est toujours en dépassement. Non seulement il est en dépassement mais TFM n’accepte pas de payer l’énergie importée de la Zambie.
En outre, à cause de ces démesures répétées de TFM, le prix au kilowatt/heure augmente de 50 %, ce qui fait que TFM paie moins cher l’énergie consommée par elle, dans ses propres installations.
Pire encore, TFM refuse de payer les nouveaux prix fixés par la SNEL à ses gros clients et accumule à ces jours USD 18 millions d’arriérés. Cette somme représente une année d’importation du courant de la Zambie.
L’autre conséquence de l’arrogance et de l’intransigeance de TFM est que le réseau devient instable, ce qui affecte les autres industries minières et les populations de toutes les villes du Katanga subissent des délestages sans précédent. Sans oublier, bien entendu, le manque à gagner au niveau du Trésor public RD-congolais, par la non atteinte des objectifs de production élevés leur assignés. La tension est à son comble. «TFM se comporte comme en territoire conquis», s’indigne un responsable katangais proche du dossier.
Depuis des questions fusent. D’où viennent l’insolence et l’intolérance de Tenke Fungurume Mining? Aurait-elle des appuis en hauts lieux? Ou simplement c’est un Etat dans un Etat.
Problématique de la fermeture 24h/24 de la ligne d’interconnexion SNEL-ZESCO
La province du Katanga est confrontée à un déficit d’énergie électrique, de l’ordre de 313 MW, résultant de l’offre de la SNEL qui tourne autour de 412 MW -disponible- et la demande des consommateurs qui avoisine les 725 MW. Ce déficit est la cause  principale de l’instabilité dans la fourniture d’électricité dans la province. L’instabilité d’électricité ne permet pas aux opérateurs économiques, essentiellement des miniers, de rentabiliser leurs investissements ni à la population de jouir des vertus de l’électricité.
Solution envisagée par SNEL
Dans la recherche des voies et moyens de stabiliser la fourniture d’électricité, la SNEL a pris l’option de placer des limiteurs de charge sur son réseau afin de contenir les consommations des uns et des autres dans les limites du disponible SNEL. Pour leur part, les consommateurs qui voudront consommer plus que la quantité leur réservée ou consignée par SNEL, pourront alors importer de l’énergie de la Zambie au tarif de l’import. L’importation de l’énergie de la Zambie n’est mieux gérée que si les limiteurs de charges sont installés.
Difficulté rencontrée
La mise en œuvre de cette solution est butée à la difficulté que la SNEL a de faire la répartition des charges du disponible, essentiellement aux clients miniers, étant donné que le producteur-fournisseur est lié avec ces clients par des contrats et de différents accords de financement. D’où l’implication du cabinet du Premier ministre afin de faciliter, par des réunions de concertations «Chambre des Mines et SNEL», le processus de répartition de charge et aussi de réfléchir ensemble sur les solutions envisageables de manière à soutenir tant soit peu l’activité minière au Katanga en dépit de la crise énergétique actuelle.
A date, ces réunions se tirent en longueur suite à l’absence d’un consensus entre les membres de la Chambre, car certains ne comprennent pas pourquoi la SNEL doit limiter aujourd’hui leur puissance en dépit de tous les accords passés avec elle.
Décisive rencontre à Kinshasa
Afin de surmonter cette difficulté, les experts des sociétés minières qui ont une grande consommation comptent se retrouver à Kinshasa pour proposer une répartition qui tiendra compte de certains critères, notamment le disponible SNEL, la puissance souscrite, les conditions de préfinancement SNEL et de remboursement, la nature des installations, la solvabilité vis-à-vis de SNEL, etc. Le but sera de pouvoir présenter lors d’une prochaine rencontre une répartition imposable à tous.
Les acteurs espèrent fermement que TFM va, lors de ces prochaines réunions, afficher sa bonne volonté pour trouver des solutions qui s’imposent, pour le plus grand bien de l’industrie minière RD-congolaise et des populations du Katanga qui souffrent des délestages devenus récurrents.
KISUNGU KAS

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