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Le FCC se déploie, l’Opposition se réunit à Bruxelles

Le microcosme politique est en pleine ébullition. Depuis le retour à Kinshasa de Jean-Pierre Bemba Gombo et la désignation d’Emmanuel Ramazani Shadari, les acteurs politiques de tous bords semblent avoir lâché leurs freins pour se lancer dans une sorte de précampagne électorale qui ne dit pas son nom. Pouvoir et Opposition occupent les médias de leur obédience et saisissent la moindre opportunité pour se signaler à l’attention du souverain primaire. Les discours oscillent autour de la tenue des élections crédibles, apaisées, inclusives, transparentes et démocratiques. La publication par la CENI des listes provisoires des candidatures jugées recevables et irrecevables pour l’élection présidentielle et les législatives a fait grimper le mercure de plusieurs crans.
 
Les états-majors des partis politiques, regroupements politiques et mouvements associatifs sont désormais à pied d’œuvre car l’échéance du mois de décembre 2018 approche à grands pas. Chacun a fait sien l’adage selon lequel «Rien ne sert de courir, il faut partir à point». Ca va vite, très vite même. Présentement, les projecteurs de l’actualité se trouvent braqués sur la Cour constitutionnelle saisie en procédure de contentieux électoral par les candidats dont les dossiers ont été placés sous l’éteignoir par la CENI. A ce stade, les pronostics vont dans tous les sens, chacun retient son souffle, à moins de croiser les doigts. La tâche de la Cour constitutionnelle est ardue d’autant plus que chaque jour qui passe apporte son lot de grosses surprises, notamment avec la découverte des candidats qui sont passés à travers les mailles des filets de la CENI. Des candidats portant plusieurs casquettes qui mangent à tous les râteliers, l’introduction par certains prétendants de leurs dossiers de manière concomitante dans plusieurs circonscriptions électorales, la présence de violeur de filles mineures condamné à de lourdes peines, la publication du certificat de détention de Jean Pierre Bemba Gombo par la Cour pénale internationale -CPI-, l’envoi à la trappe de certaines personnes vierges politiquement suite à la confusion de leur identité avec celle d’autres prédateurs… Au FCC, les principaux acteurs projettent l’image des personnes ayant maîtrisé leurs états d’âme pour jouer la même partition du soutien inconditionnel à Emmanuel Ramazani Shadari. Ils occupent désormais tout le terrain, allant de Kinshasa jusque dans les coins reculés de l’intérieur du pays pour assurer la promotion de leur joker. Les médias écrits et audiovisuels sont inondés de déclarations et cérémonies de descente sur le terrain de grosses pointures de la majorité au pouvoir qui n’ont pas attendu la dernière minute pour se jeter dans le bain. Le facteur temps va jouer un rôle déterminant dans les prochaines élections.
Unité de l’Opposition
Pendant ce temps, l’Opposition renvoie une image des personnes en plein tâtonnement. Si les uns sont en plein combat fratricide en interne au sein de leurs partis ou regroupements politiques, d’autres se signalent déjà par des maladresses criantes dans leurs communications en cherchant nécessairement à tirer la couverture de leur côté tout en vilipendant ceux avec lesquels ils doivent en principe partager le même combat. Il y en a même qui s’accordent le pouvoir de justiciers en déniant à leurs partenaires le droit de se retrouver dans l’Opposition, comme si cela constituait une chasse gardée. Et pourtant, le moment ne se prête nullement à la distraction, ni aux querelles byzantines. Dans ce tohu-bohu, quelques signaux sont tout de même perceptibles au sein de l’Opposition dont certains ténors voudraient se démarquer des sentiers battus pour jouer une nouvelle partition, celle de la désignation d’un candidat commun, condition sine qua pour placer toutes les chances de réussite de leur côté. Echaudés par le désastre de l’évolution en ordre dispersé, plusieurs leaders de la grande Opposition entendent ratisser large en plaçant leurs égos au congélateur. Voilà pourquoi depuis quelque temps la rencontre des principaux membres de l’Opposition est de nouveau à l’ordre du jour.
Tenant compte des mesures contraignantes qui éloignent certains acteurs politiques en dehors des frontières nationales, la réunion de Bruxelles revient au centre de toutes les conversations. Les noms les plus cités sont ceux de Jean-Pierre Bemba Gombo, Félix Tshilombo Tshisekedi, Moïse Katumbi Chapwe, Freddy Matungulu Mbuyamu Ilankir, Adolphe Muzito Mfumutshi, Vital Kamerhe, etc. Ces fers de lance de l’Opposition entendent se retrouver autour du tapis vert en Belgique pour se parler, se regarder droit dans les yeux, laver le linge sale en famille et arrêter des stratégies conséquentes de manière à espérer rafler la mise en décembre 2018. La voie vers Bruxelles est-elle dégagée? Les militants de ces regroupements politiques aimeraient bien y croire de manière à baliser la voie de l’alternance pacifique et civilisée au pouvoir en RD-Congo. La réussite de ce forum dépend également des résultats qui sortiront des délibérations de la Cour constitutionnelle. C’est autant dire que les nerfs des uns et des autres seront mis à rude épreuve surtout lorsqu’on sait que le champagne a coulé à flots dans certains cercles fermés pour saluer la mise à l’écart de certains candidats potentiels.
Le mois de décembre est à la porte
Quatre mois nous séparent de la date butoir du 23 décembre 2018, fixée dans le calendrier de la Commission électorale nationale indépendante -CENI-, pour l’organisation du triple scrutin. En perspective de cette date, le sort de l’Opposition politique RD-congolaise sera scellé à partir de Bruxelles, capitale de la Belgique et de l’Union européenne dès ce mois de septembre. Et comme l’avait annoncé un des candidats présidents de cette opposition, Félix Tshisekedi Tshilombo, lors de dépôt de candidature à la CENI: «Nous membres de l’Opposition, allons nous réunir en septembre prochain à Bruxelles comme certains d’entre nous sont contraints à vivre à l’étranger, en vue de nous concerter sur la candidature commune de l’Opposition à la présidentielle du 23 décembre 2018». En clair, c’est Moïse Katumbi Chapwe, président de la plateforme de l’Opposition «Ensemble pour le changement» qui a été empêché de rentrer au pays par le régime en vue de déposer sa candidature à la présidentielle. Le pouvoir a même lancé un mandat d’arrêt contre lui. On apprend que cette réunion regroupera Félix Tshisekedi Tshilombo de l’UDPS, Jean-Pierre Bemba du MLC, Martin Fayulu de la Dynamique, Freddy Matungulu de Congo na Biso, Vital Kamerhe de l’UNC, Adolphe Muzito de l’URép et Moise Katumbi d’ «Ensemble pour le changement». Certes que ces leaders seront accompagnés de leurs délégués. Il y a d’autres figures d’Opposition qui ne sont pas citées ici, mais qui prendront part à la rencontre imminente de Bruxelles. A l’ordre du jour: la désignation d’une candidature commune de l’Opposition. Reste à savoir si ces opposants parviendraient à se dépasser et à désigner le meilleur d’entre eux à la prochaine présidentielle pour affronter le candidat du pouvoir en place, à savoir Emmanuel Ramazani Shadary.  L’opinion se souviendra qu’en juin 2016, l’Opposition s’était réunie toujours à Bruxelles, à Genval, autour de feu Etienne Tshisekedi wa Mulumba. Cette rencontre avait abouti à la création du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement -RASSOP- dont la direction a été confiée à Etienne Tshisekedi. Le RASSOP avait travaillé jusqu’à obtenir le dialogue entre le pouvoir et l’Opposition. Ce qui a conduit, sous les bons offices de la Conférence épiscopale nationale du Congo -CENCO- à la signature de l’Accord politique inclusif de la Saint Sylvestre. Cet accord comporte plusieurs acquis de taille, entre autres, la non représentation de la candidature du président Kabila à un troisième mandat, l’interdiction de tout referendum, ni de révision de la Constitution en vigueur, l’organisation effective des élections, etc. Cette entente autour du patriarche Tshisekedi sera-t-elle rééditée aux prochaines assises de Bruxelles? That’s the question. L’Opposition tient à l’application stricte de l’Accord de la Saint Sylvestre. Elle réclame l’application des mesures de décrispation politiques édictées dans l’Accord, le remplacement du délégué de l’UDPS à la CENI, le nettoyage du fichier électoral avec la mise à l’écart de plus de 10 millions d’électeurs sans empreintes digitales, la mise sous l’éteignoir de la machine à voter. la désignation d’une candidature commune.
Lutte pour la conservation du pouvoir 
Interdit par la constitution de briguer un troisième mandat présidentiel, le président Kabila s’est choisi un dauphin, il s’agit d’Emmanuel Ramazani Shadary, secrétaire permanent du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie -PPRD-, ancien vice-Premier ministre de l’Intérieur et Sécurité, ancien gouverneur du Maniema, député national élu de la circonscription électorale de Kabambare en 2006 et 2011. Avant de désigner Shadary comme son successeur politique, Kabila a initié une méga plateforme électorale dénommée Front commun pour le Congo -FCC- dont l’objectif est de soutenir par les signataires de sa charte, un seul candidat à la présidentielle de décembre prochain. Et ce candidat c’est Ramazani Shadary. Actuellement, les sociétaires du FCC se déploient sur le terrain comme des poissons dans l’eau et mobilisent en faveur de Shadary. Plusieurs regroupements politiques membres du FCC ne cessent de faire des déclarations de remerciement de l’initiateur du FCC et de soutien inconditionnel à la candidature de Shadary à la présidentielle. Le FCC détient la puissance matérielle, financière et logistique. Ce qui n’est pas le cas de l’autre côté. Pendant que l’Opposition rejette la machine à voter, le FCC l’accepte ainsi que la CENI. D’ailleurs, le président de la CENI, Corneille Nangaa, a déjà dit que sans machine à voter, il n’y aura pas d’élections en décembre prochain. Le mois de septembre sera riche en événements politiques en RD-Congo. 
Octave MUKENDI 

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